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Ici, nous devons quelques précisions. L’on était en 1916, c’est-à-dire en pleine guerre mondiale. Au Dahomey, comme dans les autres colonies de l'Afrique Occidentale Française, les chefs de canton devaient fournir A l’armée coloniale un certain nombre d’hommes. Etant en visite chez son oncle, D... avait failli être désigné pour partir, en sa qualité d’étranger, car il était extrêmement rare de voir des volontaires se présenter au recrutement ; mais à ce moment, il eut tout fait pour éviter un tel sort.

Pendant sa randonnée de trois jours, le jeune chrétien avait pris une résolution : « J’ai paru être lâche, se dit-il, en évitant la question par le poison, et ma fuite semble être une défaite. Je veux prouver à mon peuple que je ne suis pas un froussard (sic) et que je suis innocent. Mon Dieu, s’écria-t-il, tu es plus fort que tous les fétiches du Dahomey réunis, je veux combattre pour la France, garde-moi, afin que je puisse revenir et prouver aux miens que tu dois régner ! »

D... alla tout droit au bureau de recrutement et demanda & s’engager comme tirailleur. L’officier fut fort surpris de voir un Dahoméen s’offrir comme volontaire, mais, devant l’insistance du jeune homme, il inscrivit son nom et l’envoya passer une visite médicale. Le médecin-major, qui parlait couramment la langue du pays, lui dit : « Voyons, mon garçon, je ne puis pas croire que de ton propre chef tu te sois décidé à l'engager comme tirailleur. Tu dois avoir une raison pour désirer partir. Ne sais-tu pas que l’on se bat ferme en France, et que tu vas au-devant de grands dangers ? »

»— Je le sais, monsieur le Major, mais je veux combattre pour la France. » »— C’est très bien, mon brave, mais raconte-moi ton histoire ; que s’est-il passé chez toi ? »

D... lui fit le récit détaillé des événements des dernières semaines, sans oublier la dernière prière qui scellait la résolution qu’il venait de prendre.

« Je comprends, maintenant, ajouta le médecin, ton histoire est fort intéressante, et me prouve que tu feras un bon tirailleur ; tu es un solide gaillard, bonne chance, que ton Dieu te garde et te ramène sain et sauf dans ton pays. »

De retour au bureau de recrutement, le jeune tirailleur fut informé qu’en qualité de volontaire, il allait recevoir une prime d’engagement. « Je ne veux rien, dit-il, car mes gens diraient que je me suis engagé pour l’argent. » Et comme l'on insistait, il ajouta : « Puisque cette somme doit être donnée, veuil-