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M. Méline aussi est un économiste ; c’est même le roi des économistes ; ce digne homme ne se borne pas à reconstituer les bilans frauduleux, mais encore il les prépare, ce qui est bien plus beau. Il a un idéal économique : la vie chère. Il faut, pour qu’il soit grand et fort, qu’un peuple crève de faim : Or, pour qu’un peuple crève de faim, M. Méline a observé qu’il suffit de le protéger. Et, par protéger, M. Méline entend qu’il faut obliger le producteur à produire les objets de consommation à des prix tels que personne ne puisse plus consommer. Voilà tout le système. Depuis qu’il fonctionne, sous la garde des lois, il a donné de surprenants résultats. Il y a eu, de tous les côtés, des ruines en grand nombre et tout le monde s’est plaint de la cherté croissante de la vie. Jamais, non plus, tant de chômages ! Les routes s’encombrent de pauvres diables qui vont cherchant du travail et qui n’en trouvent pas ; les prisons municipales regorgent de douloureux vagabonds.