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ment, il l’agrandit, le développa, et inventa de la première à la dernière scène le drame de l’Apollonide. Se sentant incapable d’écrire de la belle musique sur de viles paroles, il ne pouvait lui venir à l’esprit de s’adresser à un vulgaire fournisseur d’opéras. Il alla trouver Leconte de Lisle avec un scénario tout fait et tout entier rédigé de sa main. Leconte de Lisle reçut d’abord fort mal le jeune compositeur : il détestait qu’on lui imposât une besogne, surtout une telle besogne… Mais Franz avait de l’éloquence, une séduction si entraînante, une si ardente conviction, que Leconte de Lisle finit par céder. Il écrivit l’Apollonide. Le poème était correct, d’une belle langue robuste, certes, avec de beaux vers, çà et là, mais froid et glacé. Il ne plut pas au musicien, qui le voulait débordant de