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Bolorec, de voir la discipline se relâcher un peu, et les classes s’interrompre. On joua une pièce de Sophocle, traduite en vers latins par le Père de Marel, avec des intercalations de chœurs, chantés sur de la musique de Guillaume Tell, également corrigée par le même Père de Marel, dont le rôle, dans la maison, était de confectionner des vers, en toutes langues, gais ou tristes, profanes ou sacrés, et s’adaptant aux cérémonies qu’on y célébrait. C’était un gros bonhomme, rond, plaisant à regarder, toujours en train de rire, et qu’on aimait beaucoup, parce qu’il représentait uniquement la joie. On ne le voyait jamais qu’au moment des fêtes, où il se prodiguait en inventions de toute sorte, joviales et brillantes. Le reste du temps, disait-on, il voyageait.

Pendant les trois jours que durèrent, au collège, les fêtes du carnaval, le Père de Marel, sans cesse au milieu des élèves, avait remarqué Sébastien assez triste, qui restait à l’écart des autres, et il l’avait reconnu pour le petit enfant qui, sous les marronniers, près de la prairie, le jour même de la rentrée des classes, était venu se jeter, en courant, dans sa soutane. De son côté, Sébastien l’avait aussi reconnu. Il aurait bien voulu lui parler, mais il n’osait pas, ayant gardé de sa folie, comme une honte, que la présence du Jésuite redoublait. Ce fut le père de Marel qui l’aborda, suivi du Père Dumont.

— Eh bien ! Eh bien !… dit-il amicalement. On ne s’amuse donc pas ? Pourquoi êtes-vous là, tous les deux, à vous morfondre, quand la fête est partout… Il faut rire… C’est le moment.

Et se tournant vers le Père Dumont :