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bien obligés de laisser passer « nos duellistes ». Ils avaient ordre de saisir les armes. Or, en fait d’armes, ils n’avaient trouvé que les trousses des médecins, ce qui amena une longue discussion et de vifs pourparlers. Devait-on saisir ou ne devait-on pas saisir ? Ces trousses pouvaient-elles être considérées comme des armes ? Les uns tenaient pour que l’on saisît ; les autres hochaient la tête d’un air de doute. Le sergent, très perplexe, après avoir minutieusement examiné sondes, lancettes et bistouris, estima que c’était effectivement des armes, mais « en considération de ce qu’il connaissait » l’un des deux médecins, il les autorisa à garder leurs trousses, pour cette fois seulement.

La petite troupe franchit le fossé qui sépare la France de l’Andorre, et se mit à escalader la Soulane, péniblement. Pescaire et Cassaire marchaient au hasard, trébuchaient contre les pierres roulantes, glissaient sur l’herbe ronde, la tête basse, le cœur vacillant. Le paysage, d’ailleurs, n’était