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Ni les certificats, ni l’examen médical, ni le minutieux interrogatoire qu’il me fallut subir ne furent jugés suffisants. Le petit monsieur désira envoyer à toutes les personnes chez qui j’avais servi un questionnaire très détaillé sur mon caractère, mon état mental, mes qualités évidentes, mes défauts possibles, mes dispositions au meurtre, ataviques ou autres, etc. Je n’avais rien à redouter de cette enquête et je m’y prêtai de la meilleure grâce du monde, car vous pensez bien que j’avais négligé de compter parmi mes références celles du fermier de Quimper… Mais, au fond de moi-même, énervé par ces défiances, horripilé par cette sorte d’espionnage physiologique, auquel, comme un criminel, j’avais dû me soumettre, je sentais, pour la seconde fois se lever des pensées obscures et de troubles désirs, dont il me semblait qu’ils exhalaient une odeur âcre et forte, grisante et terrible.

Huit jours après cette entrevue, le petit monsieur me fit prévenir que je pouvais arriver chez lui avec mes bagages et prendre immédiatement possession de mon service de cocher.

J’y allai tout de suite…

Mon nouveau maître habitait, dans la rue du Cherche-Midi, une très ancienne maison qui, malgré d’annuelles réparations, gardait un aspect fort délabré. Lui-même était un vieux maniaque. Il collectionnait – je vous demande un peu – des éteignoirs !