Page:Mirbeau - Les Vingt et un Jours d’un neurasthénique, 1901.djvu/362

Cette page n’a pas encore été corrigée

— Comment t’appelles-tu ?

— Louis Morin…

— Louis Morin ?… Morin ça n’est pas un nom d’ici ?… Louis Morin ?… Tu n’es pas d’ici ?

— Non, monsieur le vicaire.

— Es-tu chrétien, seulement ?

— Oui, monsieur le vicaire…

— Tu es chrétien… tu es chrétien… et tu t’appelles Morin ? … Et tu n’es pas d’ici ? Hum ! Hum ! Ce n’est pas clair… Et d’où es-tu ?

— Je suis de l’Anjou…

— Enfin, c’est ton affaire… Et qu’est-ce que tu fais ici ?

— Depuis deux mois, je suis gardien de la propriété de M. Le Lubec…

Le vicaire haussa les épaules, grogna…

— M. Le Lubec ferait bien mieux de faire garder sa propriété par des gens d’ici… et ne pas empoisonner le pays d’étrangers… de gens d’on ne sait d’où ils sont… car enfin je ne te connais pas, moi !… Et ta femme ?… Es-tu marié, seulement ?

— Mais oui, je suis marié, monsieur le vicaire. Je vous ai fait remettre mes papiers, pour l’acte, par le facteur.

— Tu es marié… tu es marié… c’est facile à dire… Tes papiers ? c’est facile à faire. Enfin, nous verrons ça… Et pourquoi ne t’aperçoit-on jamais à l’église ?… Tu ne viens jamais à l’église, ni toi, ni ta femme, ni personne de chez toi ?…