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expression bizarre, où il y avait plus d’étonnement encore que d’admiration.

» – Et c’est vous qui avez trouvé ça ?… Mais, sapristi… vous êtes un honnête homme… un brave homme… Vous êtes un héros… il n’y a pas à dire… vous êtes un héros.

» – Oh ! monsieur le commissaire…

» – Un héros… je ne m’en dédis point… Car, enfin… vous auriez pu… Enfin, mon brave homme… vous êtes un héros, quoi !… C’est un acte splendide que vous faites là… un acte héroïque… Je ne trouve pas d’autre mot… vous méritez le prix Montyon… Comment vous appelez-vous ?

» – Jean Guenille… monsieur le commissaire.

« Le commissaire leva vers le plafond enfumé de son bureau deux bras attestateurs :

» – Et il s’appelle Jean Guenille !… C’est admirable… C’est à mettre dans un livre… Votre profession ?

» – Hélas ! répondit le mendiant… je n’ai aucune profession…

» – Comment, pas de profession ?… Vous vivez de vos rentes ?

» – De la charité publique, monsieur le commissaire… Et, vraiment, puis-je dire que j’en vis ?

» – Ah ! diable ! Ah ! diable !… Je crains bien que les choses ne se gâtent un peu… Ah ! diable !

« Ici, le commissaire esquissa une grimace, et, d’une voix moins enthousiaste :