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Après un court silence, durant lequel nous entendions davantage, sous nos pas plus pesants, crier le sable rouge de l’allée, elle reprit, d’une voix chantante :

— Et je voudrais aussi… quand je serai morte… je voudrais que l’on mît dans mon cercueil des parfums très forts… des fleurs de thalictre… et des images de péché… de belles images, ardentes et nues, comme celles qui ornent les nattes de ma chambre… Ou bien… je voudrais… être ensevelie… sans robes et sans suaire, dans les cryptes du temple d’Élephanta… avec toutes ces étranges bacchantes de pierre… qui se caressent et se déchirent… de si furieuses luxures… Ah ! mon chéri… Je voudrais… je voudrais être morte, déjà !

Et, brusquement :

— Quand on est morte… est-ce que les pieds touchent le bois du cercueil ?…

— Clara !… implorai-je… Pourquoi toujours parler de la mort ?… Et tu veux que je ne sois pas triste ? Je t’en prie… ne me rends pas fou tout à fait… Abandonne ces vilaines idées qui me torturent… et rentrons… Par pitié, ma chère Clara, rentrons.

Elle n’écoutait pas ma prière et elle con-