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subissait les plus répugnantes étreintes avec une sorte de volupté pâmée. Elle tendait son corps — tout son corps svelte et vibrant — aux brutalités, aux coups, aux déchirements. Sa peau, si blanche, se colorait de rose ardent ; ses yeux avaient un éclat noyé de joie sexuelle ; ses lèvres se gonflaient, tels de durs bourgeons prêts à fleurir… Elle me dit encore, avec une sorte de pitié railleuse :

— Ah ! petite femme… petite femme… petite femme !… Vous ne serez jamais qu’une petite femme de rien du tout !…

Au sortir de l’éblouissante, de l’aveuglante lumière du soleil, le couloir où, enfin, nous parvînmes, me sembla, tout d’abord, plein de ténèbres. Puis, les ténèbres peu à peu s’effaçant, je pus me rendre compte du lieu où je me trouvais.

Le couloir était vaste, éclairé d’en haut par un vitrage qui ne laissait passer à travers l’opacité du verre qu’une lumière atténuée de vélarium. Une sensation de fraîcheur humide, presque de froid m’enveloppa tout entier, comme d’une caresse de source. Les murs suintaient, ainsi que des parois de grottes souterraines. Sous mes pieds brûlés par les cailloux de la plaine, le sable,