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— Et pourquoi ?

— Je ne sais pas !

— Je le désire, Marie.

Alors elle se tut. Et, longtemps, longtemps, elle me regarda, d’un regard où il y avait, tour à tour, de la terreur, et de la supplication.

— Oui, accentuai-je, il y a quelques jours que je désire aller avec toi à la Fontaine-au-Grand-Pierre…

— J’irai, dit-elle… là où vous désirez que j’aille.

Elle était pâle, d’une pâleur presque cadavérique. Et des gouttes de sueur roulaient sur ses tempes.

J’insistai :

— Voyons, Marie. Dis ceci… répète ceci : « Oui, j’irai, demain, avec vous, à la Fontaine-au-Grand-Pierre. »

Elle fit des efforts pour parler. Mais les mots qu’elle mâchait, avec des grimaces de terreur, ne sortaient pas de sa bouche, ne pouvaient pas sortir de sa bouche.

— Allons, Marie, à la Fontaine…

— À… la… Fon… taine… bégaya Marie.

— … Au-Grand-Pierre…

— Au… Grand…

Et, tout à coup, les yeux fous, la gorge haletante, elle s’affaissa sur le lit, criant :