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glais méritent-ils qu’on nous jette leur nom à la face comme une offense et comme une ordure ? J’avoue qu’individuellement j’aime les Anglais, et je ne confonds pas le peuple anglais avec l’ignominie de son gouvernement. J’ai toujours admiré, à bon droit, il me semble, leur civilisation, leur bel et noble esprit de liberté, de justice et de progrès, leur humanité sincère. En dépit de cette guerre, dont j’ai horreur, je leur trouve de fortes qualités, et je leur dois quelques bonnes impressions. En voulez-vous un exemple ? C’était le 7 Décembre dernier. Une très vieille dame de mes amies, Italienne par l’origine, Anglaise par le mariage, m’avait demandé d’aller passer quelques jours chez elle, à la suite d’un gros chagrin. Mon Dieu, oui, on peut être Anglais, et avoir tout de même de gros chagrins, je suppose. Un petit changement se fit dans la date précédemment fixée de mon voyage. Je l’écrivis à ma vieille amie qui, quoique verte encore et alerte, lit souvent à côté et brouille ainsi tout ce qu’on lui dit. Une traversée affreuse. Retard du bateau à l’arrivée de New-Haven, du train à Victoria, de moi à la gare de Richmund où je devais prendre le train pour Hampton-Wick. Une heure d’attente pour douze minutes de trajet.

— Voilà encore des choses dont les Anglais n’ont pas le monopole, dis-je. Il y a du retard partout.