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PSAUME DE LA MATURATION

Je n’ai pas trouvé la paix, dans ma jeunesse, auprès de celle qui s’offre sans angoisse, obéissant à un destin qui veut qu’elle se donne tout entière.

Sans doute l’ai-je blessée, en lui demandant cela seulement qui à ses yeux est si pauvre chose : l’intelligence et l’amour des esprits inférieurs.

Mais cette chose, je l’obtins ; et alors, terriblement armé pour la solitude, je pris congé de celle qui m’avait tout appris et qui ne pouvait plus me comprendre.

Mais que je te perde, mon maître, si jamais parole imprudente échappe de mes lèvres à son adresse ! ou si jamais je relis sans déchirement de cœur ce que tu as écrit du doigt sur le sable !..

Elle ne s’est trouvée sur mon chemin que pour le sombre couronnement de sacrifice ; mais depuis ce jour, j’écoute ce que mon ombre conte aux orties, et toute pierre, dans le gave solitaire, à mon approche frissonne…


Car c’est là la profondeur de la compagne de service d’être gardienne aussi, pour nous qui ne sommes plus ni fils ni époux, de la clef du monde devenu muet.

Elle détacha de sa ceinture — qu’elle porte sous le cœur — cette clef du premier jardin dont elle est toute