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est fatale tôt ou tard à l’activité et au progrès intellectuel de ce corps lui-même. Lié comme il l’est en toutes ses parties, suivant comme il le fait un système qui, ainsi que tous les systèmes, procède presque toujours d’après des règles fixes, le corps officiel est constamment tenté de s’endormir dans une indolente routine ; ou bien s’il sort quelquefois de cet éternel cercle, il se passionnera pour quelque idée à peine ébauchée qui aura plu à un des membres importants du corps ; et pour que ces tendances qui se touchent de près (bien qu’elles semblent opposées) puissent être tenues en échec, pour que tous les talents que renferme le corps se maintiennent à une certaine hauteur, il faut que ce corps soit exposé à une critique extérieure, vigilante et habile. C’est pourquoi il est indispensable que des talents puissent se former en dehors de l’État, avec les occasions et l’expérience nécessaires pour juger sainement les grandes affaires pratiques. Si nous voulons posséder à perpétuité un corps de fonctionnaires habiles, capable de bons services, et par-dessus tout un corps susceptible de créer le progrès et disposé à l’adopter, si nous ne voulons pas que notre bureaucratie dégénère en pédantocratie, il ne faut pas que ce corps absorbe toutes les occupations qui forment et cultivent les facultés nécessaires pour le gouvernement de l’humanité.