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l’utilitarisme

organisation, peut être transformée en habitude ; et alors nous voulons par habitude la chose que nous ne désirons plus pour elle-même, ou que nous désirons seulement parce que nous la voulons. Il n’en est pas moins vrai qu’à l’origine, la volonté est entièrement produite par le désir, si l’on fait signifier à ce mot la haine de la souffrance et l’attraction du plaisir. Laissons de côté la personne qui a la ferme volonté de faire le bien et considérons celle dont la volonté vertueuse est faible, que la tentation peut vaincre, et sur laquelle on ne peut entièrement compter : comment pourra-t-on la rendre plus forte ? comment éveiller ou implanter la volonté d’être vertueux là où cette volonté n’est pas suffisante ? Seulement en faisant que la personne désire la vertu, la voie sous un jour agréable, et non pas pénible. C’est en associant la bonne conduite avec le plaisir, et la mauvaise avec la souffrance, en forçant la personne à reconnaître par sa propre expérience que l’une amène le bonheur, l’autre la souffrance, qu’on peut faire naître cette volonté d’être vertueux, qui, développée, finit par agir sans qu’on pense au plaisir et à la souffrance. La volonté est fille du désir ; elle ne se soustrait à la puissance de son père que pour passer sous celle de l’habitude. Rien ne permet de supposer