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démoralisation qui étale ses nudités sous leurs yeux ne diminue pas leur foi aux principes moraux. Ils savent que le désordre n’invalide pas la règle. Sa nature même l’accuse; bien loin de réfuter la cou-science, il la suppose; la désobéissance n’aurait pas lieu sans le précepte. Or, le moyen le plus direct pour entraîner les hommes vers l’idéal qu’ils oublient, n’est-il pas de le faire admirer? Le poète comique agit négativement sur eux ; il leur montre que la raison et la vertu les préservent seules du ridicule. Mais ne vaut-il pas mieux les charmer par l’image du bien lui-même? C’est ce qu’exécutent Rousseau, Bernardin de Saint-Pierre, el le mâle génie dont nous racontons l’histoire. Une secrète amertume pénètre leurs ouvrages ; les nobles statues qui prennent sous leurs mains la grâce et la fierté accusent l’abjection, la mesquinerie de leur époque. Souvent même leur dépit se fraie un passage; il brise son enveloppe, et, comme un oiseau de nuit, déploie tout à coup ses ailes. Mais la satire directe n’est pas leur forme de prédilection. Ils lui substituent volontiers leurs tableaux magiques, renonçant aux attaques immédiates pour s’en tenir à la censure par contraste.

Quand Schiller produisit les Brigands, cette dernière méthode ne pouvait lui suffire. Une violente rage l’obsédait, et il peignit la société comme un lâche troupeau de misérables sans scrupules. La vigueur emphatique déployée dans ce drame est