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maire, les pétitions pleuvaient en sa faveur ; il en vint une « au nom des quarante mille ouvriers en bâtiment de Paris ». Pétion vint lui-même à la barre et dit, pour justification principale, celle-ci qui est grave : À aucun prix, et quoi qu’il arrivât, il n’avait voulu hasarder de faire couler le sang. — Le 13, l’Assemblée leva la suspension pour le maire, la maintint encore, chose remarquable, pour le procureur de la Commune, Manuel, qui, selon toute apparence, sous la direction de Danton, avait eu une part fort directe à l’organisation du mouvement.

La fête anniversaire du 14 juillet ne fut rien autre chose que le triomphe de Pétion sur le roi. Les hommes armés de piques avaient tous écrit au chapeau, avec de la craie : « Vive Pétion ! » Tout se passa paisiblement, néanmoins dans une émotion visible ; c’était un calme frémissant, comme une halte avant un combat. Parmi les symboles ordinaires qui figuraient dans la pompe solennelle, tels que la Loi, la Liberté, etc., des hommes en noir, couronnés de cyprès, portaient aussi une chose mystérieuse et redoutable, qu’on voyait briller sous un crêpe : c’était le glaive de la Loi. Voilé encore, il allait déchirer sa fragile enveloppe et devenir le fer de la Terreur.

Le roi allait comme traîné et semblait la victime. Victime moins de la Révolution que de ses convictions obstinées. Il allait, odieux de son double veto, rêveur, mélancolique, dans l’attente d’un assassinat.