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de férocité. Entre autres singularités, cet homme, très cruel dès qu’il avait vu le sang, n’en avait pas moins les larmes faciles ; il s’attendrissait sans peine, parfois pleurait comme un enfant.

Le siège fut changé en blocus. L’armée vécut comme elle put, par des contributions forcées. Pour tout ce qu’elle prenait, elle donnait des bons à payer sur les biens nationaux d’Avignon. Il y eut d’affreux désordres. Après une petite bataille où les Avignonnais vainquirent, le malheureux village de Sarrians, qui s’était défendu contre eux, fut traité comme il l’eût été par des Caraïbes. Des femmes, suivaient l’armée qui se faisaient gloire de manger de la chair humaine.

Ces atrocités rendirent force au parti papiste. Il créa à Sainte-Cécile une assemblée fédérative des communes, en face de celle que le parti français avait formée à Avignon. Celle-ci, chassée d’Avignon même par une réaction violente, se trouva errante, siégeant tantôt à l’armée, tantôt à Sorgues ou à Cavaillon. Pour comble, l’Assemblée constituante, réactionnaire elle-même, déclara, le 4 mai, qu’elle n’acceptait pas Avignon. Ceci semblait le coup de grâce. La France exterminait d’un mot ceux qui s’étaient perdus pour elle. L’armée qui bloquait Carpentras se révolta contre ses chefs, réclama sa solde ; Jourdan montra les caisses vides et pleura devant ses soldats. Tout était perdu ; déjà de soi-disant constitutionnels d’Avignon avaient, dans leur club des Amis de la constitution, déclaré les