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sante dans la constitution de 1791. Elle n’avait guère d’action que négative ; elle ne pouvait que pour empêcher. Le veto suspensif dont elle armait le roi pouvait suspendre trois ans l’exécution des décrets ; puissance irritante, provocante, qui devait infailliblement amener des explosions. À cela près, la royauté restait une majestueuse inutilité[1], un de ces meubles antiques, magnifiques et surannés, que l’on garde dans une maison moderne, par je ne sais quel souvenir, mais qui gênent, occupent une vaste place inutile, et que l’on se décidera un matin à loger au garde-meuble.

L’Assemblée avait ôté l’action au roi et ne l’avait pas donnée au peuple. Le principe du mouvement manquait partout dans cette vaste machine ; l’agitation était partout, nulle part l’action.

La constitution était-elle essentiellement bourgeoise, comme on l’a tant répété ? On ne peut le dire. La condition d’élection à laquelle on s’arrêta, deux cent cinquante francs de revenu, était tout à fait illusoire, si l’on voulait fonder un gouvernement bourgeois. Le républicain Buzot s’en moqua lui-même et dit : « À votre point de vue, ce n’est pas deux cent cinquante francs de revenu que vous deviez exiger, mais deux cent cinquante francs de contribution. » C’eût été alors en effet une vraie base

  1. Camille Desmoulins dit très bien : « … On a laissé à la France le nom de monarchie, pour ne pas effaroucher ce qui est cagot, idiot, rampant, animal d’habitude… ; mais à part cinq ou six décrets, contradictoires avec les autres, on nous a constitués en république. »