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Si l’on eût osé faire une enquête sérieuse sur l’événement, je crois qu’on eût trouvé les gardes soldés pour exécuteurs et les royalistes pour instigateurs.

On s’en garda bien. Pourquoi ? Parce qu’à ce moment même les constitutionnels, alliés des royalistes pour relever la royauté, auraient voulu plutôt ensevelir au fond de la terre un acte si malencontreux, si funeste à leurs desseins.

Des deux côtés, véritablement, on dirait qu’il y eut une entente coupable pour obscurcir et embrouiller[1]. L’examen, la comparaison la plus sérieuse des actes et des témoignages, le contrôle des uns par les autres, ont pu seuls cribler les faits, écarter les mensonges hardis de tel ou tel contemporain et nous amener aux résultats plus vraisemblables, j’ose dire à peu près certains, que nous venons d’indiquer.

Voyons quel fut dans Paris l’effet de l’événement.


La terrible fusillade, trop bien entendue, avait serré tous les cœurs. Tous, de quelque parti qu’ils fussent, eurent un pressentiment funèbre, une sorte de frissonnement, comme si, du ciel déchiré, une lueur des futures guerres sociales leur eût apparu.

Mais nulle part l’effet de terreur ne fut plus

  1. La Fayette, dans ses Mémoires (où il parle, en vérité, d’une manière trop dégagée d’un si cruel événement), suppose que deux chasseurs furent tués avant le massacre ; il est constaté qu’ils le furent après, dans la soirée ou dans la nuit. Il n’y eut, avant le massacre, que deux personnes blessées, un aide de camp du général et le dragon près de Bailly.