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drez. » — Et Robespierre : « Un tel décret déciderait d’avance qu’il ne sera pas jugé… » — Les compères, surpris trop visiblement en flagrant délit, n’osèrent insister pour l’instant. L’Assemblée ne vota pas.

En revanche elle refusait d’entendre la pétition signée : le Peuple. Barnave insista bravement pour qu’elle fût lue le lendemain, ajoutant ces paroles menaçantes qui disaient assez qu’on était en force : « Ne nous laissons pas influencer par une opinion factice… La loi n’a qu’à placer son signal, on verra s’y rallier les bons citoyens. » Ce mot, pris alors au sens général, fut mieux entendu, lorsqu’au dimanche suivant l’autorité, pour signal, déploya le drapeau rouge.

L’agitation de Paris allait augmentant. Le hasard avait voulu que, du dimanche au dimanche, du 10 au 17, la population, pour des causes diverses, fût tenue toujours sur pied, toujours en émoi. Ceux qui ont l’expérience de cette ville savent bien qu’en pareil cas l’agitation prolongée va croissant et qu’infailliblement elle tend à l’explosion. Le dimanche 10, la foule alla au-devant du convoi triomphal de Voltaire ; mais le mauvais temps l’empêcha de traverser Paris ; il s’arrêta à la barrière Charenton. La fête n’eut lieu que le lundi, avec un concours incroyable de peuple. Au quai Voltaire, devant l’hôtel où mourut le grand homme, on fit halte ; on chanta des chœurs à sa gloire ; la famille des Calas, sa fille adoptive, Mme de Villette, vinrent,