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Les poésies de Michel-Ange
recueillies par
Ascanio Condivi[1]

Spero tra poco tempo dar fuore alcuni suoi sonetti e madrigali, quali io con lungo tempo ho raccolti, si da lui, si da altri : e questo per dar saggio al mondo, quanto nell’invenzonie vaglia, e quanti bei concetti naschino da quel divino spirito.

… J’espère avant longtemps mettre dehors les sonnets et les madrigaux de Michel-Ange, tels que je les ai recueillis de lui et d’autres ; et je publierai cet essai, pour donner au monde la preuve du trésor d’invention et de la beauté de pensées qui naquirent de ce divin génie. (Voir le dernier chapitre de la Vie de Michel-Ange, par Condivi, p. 45 de ce volume.)

Sonnet I
Non ha l’ottimo artista…

Tout ce qu’un grand artiste peut concevoir, le marbre le renferme en son sein ; mais il n’y a qu’une main obéissante à la pensée qui puisse l’en faire éclore.

De même tu recèles en toi, beauté fière et divine, et le mal que je fuis et le bien que je cherche ; mais l’effet de mes soins est contraire à mes vœux, et c’est ce qui me donne la mort.

Je n’accuserai donc de mes maux ni le hasard, ni l’amour, ni tes rigueurs, ni tes dédains, ni le sort, ni tes charmes,

Quand tu m’offres à la fois, dans ton cœur, la mort avec la vie, et que mon génie impuissant ne sait y puiser que la mort.


Sonnet II
Non vider gli occhi miei…

Non, ce ne fut pas un objet mortel qui s’offrit à ma vue, quand le doux éclat de tes yeux vint me frapper pour la première fois ; et mon âme espéra trouver en eux la paix du ciel, seule fin qu’elle se propose.

Cette âme ardente, que ne peut satisfaire une beauté périssable et trompeuse, déploie ses ailes vers les cieux d’où elle est descendue, et s’élance à la source même de la beauté universelle.

  1. Le manuscrit des Poésies de Michel-Ange est aux Archives Vaticanes, avec celui de la Vie de Michel-Ange par Condivi. Ces deux textes ont été publiés, d’après ces deux manuscrits, par M. Saltini, en 1908, chez l’éditeur Barbera, de Florence. La traduction des pièces que nous reproduisons ici est extraite de l’édition très littéraire qu’en a donnée M. Varcollier, en 1856.