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CORRESPONDANCE

solide et bonne part, et quand vous verrez quelque chose qui vous paraisse profitable, avisez-m’en pour que je vous fasse une provision d argent. Il faut que cette lettre soit commune à vous trois.

0000(Ibid.)


Rome, 6 février 1546.0000

Tu as été bien pressé à m’aviser de vos vues sur la propriété des Corboli. Je ne croyais pas que tu fusses encore à Florence. As-tu donc peur que je ne me repente de mes intentions ? Es-tu peut-être déjà engagé ? Je te dis que je veux aller doucement, parce que l’argent que j’ai ici, je l’ai gagné avec une fatigue dont ne peut se douter celui qui est né chaussé et vêtu, comme toi Quant à venir à Rome si impétueusement, je ne sais si tu aurais tait ce voyage aussi vite dans le cas où j’eusse été dans la misère et où j’eusse manqué de pain. Il t’appartient de jeter dehors l’argent que tu n as pas gagné Quel souci mets-tu donc à ne pas perdre cet héritage ! Et quelle obligation avais-tu de venir ici, pour l’amour que tu me portes : l’amour du ver dévorant ! Si tu m’aimais, tu m’écrirais : « Michel-Ange, dépensez cet argent pour vous-même, à Rome ; car vous nous en avez tant donne, qu’il suffit Nous avons plus de souci de votre vie que de vos écus. » Vous avez vécu de moi depuis déjà quarante ans, et je n’ai jamais eu de vous tous une bonne parole. Il est vrai que, l’an passé, je t’ai tant sermonne et repris que, pris de honte, tu m’as envoyé un fût de Trebbiano, et tu ne me 1 aurais pas envoyé autrement. Je ne t’écris point ceci parce que je ne veux pas acheter (de propriété). Je veux en acheter, au contraire, pour me faire une réserve ; car je ne puis plus travailler. Mais je veux aller doucement, pour ne pas faire achat de quelque ennui. Ainsi donc, ne te presse pas.

P.-S — Quand bien même on te demanderait ou réclamerait quoi que ce soit, de ma part, ne crois à personne que tu ne voies un écrit de ma main.

0000(Ibid.)


Rome, 15 juin 1546.0000

… J’ai bien la tête à autre chose qu’à des procurations. Ne m’écris plus : car chaque fois que je vois une de tes lettres, la fièvre me reprend, tant je me fatigue à te lire. Je ne sais où tu es allé à l’école ; je crois que si tu avais à écrire au plus grand âne de ce monde, tu t’y appliquerais davantage. N’augmentez point les ennuis qui sont les miens, et j’en ai tant qu’ils me suffisent.

0000(Ibid.)


4 sept. 1546.0000

Tu m’as écrit toute une Bible pour un si petit sujet, et tu ne fais que m’ennuyer au sujet de l’argent que tu as reçu. Si tu veux savoir ce qu’il en faut faire, conseillez-vous ensemble et employez-le à ce qui vous sera le plus utile.

0000(Ibid.)