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CORRESPONDANCE

ordonné que le corps fût porte à Florence, selon les recommandations réitérées que le défunt nous avait faites, deux jours encore avant sa mort. Ensuite il est allé chez le gouverneur pour reavoir lesdits cartons et une caisse contenant dix mille ducats, — tant en ducats neufs, de Caméra, qu’en vieux ducats du Sole, — et encore pour environ cent autres ducats de monnaie courante : ils avaient été comptés, le samedi où fut fait l’inventaire, avant que le corps fût porté à l’église paroissiale des Saints-Apôtres. Le coffre a été aussitôt restitué avec l’argent dedans, le tout avant été scellé. Mais les dessins ne lui ont pas été rendus encore ; et quand il les demande, on lui répond qu’il doit se tenir pour satisfait de la remise des ducats. Si bien, que j’ignore ce qu’il en adviendra.

Je crains de vous écrire une trop longue lettre. Je n’ai pas voulu, en cette circonstance, vous en envoyer une trop sèche. C’est par Michel que je vous ferai écrire la prochaine. Veuillez faire part de celle-ci à notre sieur Jean-Baptiste Tassi, qui me connaît trop pour croire que j’aie pu l’oublier, encore que je ne lui aie pas écrit. Pardonnez-moi pour l’extrême fatigue que je prends à écrire, comme je l’éprouve pour toute chose. Adieu.

De V. S. le très atfectionné,

Daniel Ricciarelli [1].0000

0000(Bibl. Nat. de Florence.)



LXXXI

Georges Vasari à Léonard Bnonarroti.
Florence, le 4 mars 1564.0000

0000Très magnifique messer Léonard,

Avec quel déplaisir j’ai appris la nouvelle de la mort de messer Michel-Ange, qui fut autant mon père par affection, que votre oncle par parenté ! J’ai encore plus regretté que vous ne l’ayez pas trouvé vivant. Il est clair pour moi que le grand Dieu qui l’avait concédé par miracle à ce siècle, tant pour son rare talent que pour la sainteté de ses mœurs, l’aura recueilli à ses pieds afin qu’après avoir fait, de ces mains, l’ornement du monde, il fasse de cette âme l’ornement du paradis.

Nous avons appris certains détails de son testament ; mais, encore que je croie que celui qui m’en a écrit ait dit vrai, je ne me réjouirai ni ne m’attristerai d’aucune chose entendue jusqu’à ce que je l’aie apprise par vous-même. Je vous dirai qu’après votre départ, j’ai envoyé chez vous, auprès de dame Cassandre, votre épouse, pour lui offrir mes meilleurs services. Elle, qui est

  1. Né à Volterra en 1509, élève de Giovantonio Sodoma et, plus tard, ami de Michel-Ange, qui accepta qu’il revêtît les parties du Jugement dernier reconnues trop nues par les papes Paul IV et Pie IV. Ayant ainsi servi de culottier à l’art, il porta le surnom de braghettone. Il mourut à Rome, en 1566, pendant qu’il travaillait à la statue équestre de Henri II, commandée par Catherine de Médicis à Michel-Ange, qui, trop vieux, en avait confié l’exécution à Daniel de Volterre.