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paradoxe difficile à soutenir dans une opinion qui n’a point d’ailleurs pour appui l’autorité des anciens. Mais depuis que j’ai relu le poème d’Homère en présence du mont Ida, aux bords du Simoïs et du Xante, sous le beau ciel de la Troade, une opinion si nouvelle et si hardie m’a paru encore bien plus étrange. Lorsqu’on voit la physionomie de ces contrées si fidèlement empreinte dans tous les chants de l’Iliade, on se persuade, qu’il a fallu voir les lieux pour réunir une si haute poésie et tant de vérité et d’exactitude. Or, si le chef-d’œuvre de l’épopée est, comme on le dit, l’ouvrage de plusieurs auteurs, on est obligé d’admettre que tous ces auteurs ont visité le théâtre des événemens, qu’ils ont tous vu les mêmes choses et de la même manière ; car dans toutes les parties du poème, ce sont toujours les mêmes couleurs locales, c’est le même ciel, la même nature, le même aspect du pays. Un si parfait accord entre plusieurs poètes différens serait presque un miracle. Je n’ai point assez de livres avec moi pour discuter à fond une semblable question ; mais lorsque je serai de retour en France, je veux m’en occuper sérieusement, si la jalouse politique nous permet encore de nous occuper de littérature Pour prix de tous les plaisirs que m’a donnés Homère, combien il me serait doux de contribuer à lui rendre son nom, et de faire entendre ma voix faveur du divin poète qu’on veut dépouiller de sa gloire.