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de quelques îles peu connues situées dans la partie du Grand Océan comprise entre le Japon et la Californie, avec 1 carte (1798) ; 4° Considérations géographiques sur la Guyane française, concernant ses îles méridionales (1797) ; 5° Mémoires sur les découvertes à faire dans le Grand Océan ; 6° Mémoires sur les découvertes faites par la Pérouse à la côte de Tartarie et au nord du Japon (1798) ; 7° Recherches sur l’île de Juan de Lisboa (1801) ; 8° Considérations géographiques sur les îles Dina et Marsevien, avec 1 carte, (1801) ; 9° Observations sur la carte itinéraire romaine, appelée communément carte de Peutinger, et sur la Géographie de l’anonyme de Ravenne (ibid.) ; 10° Recherches sur l'île Antillia[1] et sur l’époque de la découverte de l’Amérique, avec 1 carte. Buache professa la géographie à l’école normale en 1791, et ses leçons ont été imprimées dans le recueil de cette école. Pendant le règne de la terreur, il fut dénoncé pour avoir donné des leçons de géographie au roi et perdit sa place au dépôt de la marine ; mais, après la chute de Robespierre, il y fut réintégré le 27 août 1795, et il a toujours continué depuis à en exercer avec assiduité les fonctions jusqu’au 21 novembre 1825, époque de sa mort. Il était alors âgé de 81 ans, et il en comptait soixante-deux de services effectifs. Jusqu’au dernier moment il conserva ses facultés intellectuelles. Il s’était marié deux fois ; la seconde fois à l’âge de soixante ans, avec une de ses cousines qui le rendit père d’une fille, objet de ses plus tendres affections, et à laquelle il eut le temps encore, avant de terminer sa longue et heureuse carrière, de procurer un époux [2]. Buache avait été fait chevalier de la Légion d’honneur. W-B.


BUAT-NANÇAY (Louis-Gabriel, comte du), ne le 2 mars 1752, d’un gentilhomme de Normandie sans fortune. À peine sorti de l’enfance il entra dans l'Ordre de Malte ; un hasard heureux lui fit faire la connaissance du chevalier Folard, connu par ses commentaires sur Polybe. Cet officier l’accueillit, le logea dans sa maison, et lui donna une éducation qui eût été parfaite, si Folard, zélé janséniste, ne lui inculqua en même temps la doctrine absurde des enthousiastes qui croyaient aux miracles opérés sur le tombeau du diacre Paris. Le jeune du Buat se dégagea peu à peu de ces erreurs superstitieuses mais il avait puisé à cette école une rigidité de principes qu’il conserva toute sa vie. Folard avait un neveu qui fut depuis ministre du roi de France en diverses cours d’Allemagne, et près de qui le chevalier du Buat se forma à la politique, et commença les études nécessaires à celui qui entreprend d’écrire l’histoire. Il fut successivement ministre de France à Ratisbonne et à Dresde ; mais ces deux places ne lui fournirent l’occasion d’aucune négociation importante. Cette espèce de nullité, et le déplaisir de voir avancer rapidement des hommes dont la capacité était bien inférieure à la sienne, le déterminèrent à quitter les affaires publiques : sa retraite eut lieu en 1776. Il s’était marié très-jeune, avait perdu sa femme de bonne heure, et avait pris le titre de comte du Buat. Il épousa en Allemagne une baronne de Falkemberg. Il est mort à Nançay en Berri, le 18 septembre 1787, et n’a point laissé d’enfants. Son nom est moins connu et ses ouvrages moins estimés en France que dans les pays étrangers, et surtout en Allemagne. Il avait prétendu déterminer l’origine de la nation bavaroise dans un de ses premiers ouvrages imprimé à Munich en 1762, in-4°, réimprimé à la tête de son Histoire ancienne, etc., et qui est devenu classique parmi les savants d’Allemagne. En continuant ses recherches, il changea de système, et développa avec une grande sagacité, dans un autre ouvrage, les motifs de ce changement d’opinion ; mais il avait si fortement établi sa première doctrine, que l’Allemagne savante y a persista, et y persiste peut-être encore. Il savait fort bien presque tout ce qui peut s’apprendre par l’étude, et fort mal ce qu’enseignent la société et le commerce avec les hommes. Comme il avait un respect scrupuleux pour la vérité, il croyait aisément la même disposition dans les autres, ce qui le rendait fort crédule, et peut-être plus qu’il ne convient de l’être dans la profession qu’il avait embrassée ; mais s’il fut quelquefois trompé sur des faits particuliers, il le fut rarement dans ses observations sur les affaires générales : il en faisait l’application la plus heureuse au temps présent, et il jugeait l’avenir comme par intuition. On lui a plusieurs fois entendu dire avant 1775 : « La monarchie française finira avec Louis-Auguste, comme l’empire romain a fini avec Augustule.» Dès l’an 1765, il sembla pressentir, dans un de ses ouvrages, la révolution de 1789. Il travaillait avec une grande facilité : presque tous ses manuscrits sont sans ratures ; mais il y a une grande inégalité dans son style. À côté de pages écrites avec une grande énergie, et souvent même avec élégance, on en trouve une plus grand nombre très-négligées, quelquefois même très-incorrectes. Il a publié : 1° Tableau du gouvernement actuel de l’empire d’Allemagne, traduit de l’allemand de J.-J. Schmauss, avec des notes historiques et critiques, Paris, 1755, in-12. 2° Les Origines, ou l’ancien Gouvernement de la France, de l’Italie, de l’Allemagne. La 1re édition est en 4 vol. in-12, la Haye, 1737 ; la Haye (Paris), 1789, 5 vol. in-8°. Cet ouvrage, qui fut traduit en allemand (Bamberg, 1764), n’eut pas d’abord en France tout le succès qu’il méritait, parce

  1. Dans ce mémoire. Buache prétend que cette île Autillia n’est autre chose que lune des Açores, qu’elle n’est point une des tics d’Anér1qus, etqu’aiusi l’Amérique n’était point connue avant le premier voyage de Ghrlstaphe Colomb. Cu-s.
  2. Buache était logé aux galeries du Louvre. Il prenait les titres de premier géographe du roi, garde-adjoint du dépôt des cartes et journaux de la marine. Il avait pour cette place d’adjoint un traitement de 21 000 livres par an. En 1788, lorsque le gouvernement de Louis XVI se trouva dans la dangereuse nécessité de convoquer les états généraux, Buache fut chargé, par le garde des sceaux (Lemoignon), de dresser en toute hâte les cartes géographiques des grands bailliages. Mais les événements marchaient plus vite que le géographe qui travailla, écrivit-il au ministre, trois mois entiers, presque jour et nuit. Il n’y eut que deux de ces cartes de terminées, et ce travail devenant inutile, Buache écrivit au garde des sceaux : Je ne demande que le prix de mon temps. Ce prix fut fixé par le ministre, en novembre 1788, a 1100 livres, ce qui était bien modique. V-va.