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l’exactitude des recherches. Mais il était réservé au philosophe de Paw de détruire le préjugé que conservaient encore beaucoup d’écrivains en faveur de la gymnastique. Il a montré combien nuisit à la constitution des Athéniens l’abus des exercices violents, contre lesquels Galien lui-même s’élève avec force dans ses divers écrits. Les recherches qu’avait faites l’abbé Fraguier sur nun passage de Platon attirèrent ensuite l’attention de Burette. Dans ce passage, qui se trouve au 7e livre des Lois, le mot harmonie, plusieurs fois employé, avait fait penser au jésuite que les Grecs connurent ce que nous appelons contre-point, et il inséra, dans les Mémoires de l’académie des inscriptions, ses réflexions à ce sujet. Burette réfuta victorieusement cette opinion dans un autre mémoire, t. 5, p. 118 de la partie historique. Il prouva que les anciens ignorèrent l’art de composer en plusieurs parties ; que tous les concerts s’exécutaient à l’unisson (homophonie) ou à l’octave, qui n’est qu’une espèce d’unisson (antiphonie) ; que chez eux, l’harmonie n’était autre chose que cette partie de la mélopée qui a pour objet la succession des sons, du grave à l’aigu, de l’aigu au grave, suivant de certains rapports déterminés par les règles. Il ne s’en tint pas à ce premier mémoire. Il publia successivement : 1° de la Symphonie des anciens, tant vocale qu’instrumentale (t. -1, p.116).2° Du Rhythme de l’ancienne musique (t. 5, p. 132). Dans cet écrit, il combat plusieurs assertions d’Isaac Vossius ; mais il n’a pas toujours la raison pour lui. 5° De la Mélopée de l’ancienne musique (ibid., p. 169). Ce fut dans ce mémoire que Burette publia trois lambeaux de soi-disant musique grecque, qu’il avait découverts dans un manuscrit, et qu’il prit grande peine à traduire en notes modernes ; un hymne à Calliope, un à Némésis, un autre au dieu de Délos. Tout ce qu’il y avait dans Paris d’érudits, de savants, de gens du monde, se réunit plus de vingt fois pour entendre et pour admirer, en bâillant, ces précieux restes de l’art des Linus et des Therpandre. Avouons-le de bonne foi, rien n’était plus ridicule qu’un tel concert et de pareils auditeurs. « Je suppose, dit Rousseau, ces échantillons fidèles ; je veux même que ceux qui prétendent en juger connaissent suffisamment le génie et lancent de la langue grecque. Qu’ils réfléchissent qu’un Italien est juge incompétent d’un air français ; qu’un Français n’entend rien du tout à la mélodie italienne ; puis, qu’ils comparent les temps et les lieux, et qu’ils prononcent s’ils l’osent. » Quant à nous, nous pensons que ce fut l’ennui que donnèrent à Burette lui-même ces antiques psalmodies qui lui dicta le mémoire sur les effets de la musique ancienne. 4° Histoire littéraire du dialogue de Plutarque sur la musique (t. 8, p. 44) ; on y trouve la nomenclature des éditions de ce dialogue, l’indication des variantes du texte, des traductions, la notice et l’examen des critiques et commentateurs. 5° Nouvelles Réflexions sur la symphonie des anciens (ibid., p. 63). Cet écrit est dirigé contre le P. du Cerceau, qui avait opposé à Burette un prétendu concert à la tierce, différent du magadis ordinaire. 6° De Divers Ouvrages modernes touchant l’ancienne musique (ibid., p. 1’°) : il y combat le P. Bougeant, qui, partageant l’opinion de l’abbé Fraguier, avait attaqué Burette dans le Journal de Trévoux, et l’abbé de Chateauneuf, auteur des Dialogues sur la musique des anciens. 7° Traité de Plutarque sur la musique (t. 8, p. 27) : on en trouve l’analyse à la p. 80. 8° Dialogue de Plutarque sur la musique. Cet ouvrage contient le texte grec, corrigé avec soin, la traduction de Burette, et des notes nombreuses, dans lesquelles on trouve des notices sur plus de soixante-dix musiciens de l’antiquité. Il fut publié en 4 parties (t. 10, p. 111 ; t. 15, p. 175 ; t. 15, p. 295, et t. 11, p. 51). Le Dialogue de Plutarque fut aussi tiré séparément à un petit nombre d’exemplaires, Paris, imprimerie royale, 1735, in-4°. C’est le seul des mémoires de Burette que l’on ait détaché de la collection de l’académie. 9° Les merveilleux effets attribués à la musique des anciens ne prouvent pas qu’elle fût aussi parfaite que la nôtre (t. 5, p. 133). Burette a montré dans ce mémoire que l’on peut exceller dans la pratique d’un art, tel que la musique, que l’on peut même en posséder parfaitement la théorie, et cependant n’avoir pas la plus légère notion de la poétique de cet art, du principe imitatif qui le constitue art libéral, et de l’espèce particulière d’imitation qui lui est propre ; car, puisqu’ils sont de natures différentes, chacun des beaux-arts doit avoir son genre comme son moyen d’imitation, ce que n’ont point observé la plupart de ceux qui ont écrit sur l’esthétique. Il y a sans doute beaucoup d’exagération dans ce que les Grecs nous racontent des effets merveilleux de leur musique ; mais il est incontestable que, pour eux, pour leur langue, pour le rhythme et l’accent de leur poésie, cette musique était beaucoup plus parfaite que la nôtre, qui peut a peine compter six hommes de génie parmi les compositeurs modernes. 10° Observation servant d’épilogue et de conclusion, avec des remarques touchant la musique, dans lesquelles on compare la théorie de l’ancienne avec celle de la moderne, en 3 parties (t. 17). Malgré l’érudition répandue dans les mémoires de Burette sur la musique, on ne saurait y puiser une juste idée du diagramme ou grand système, des Grecs, composé de quatre tétracordes, unis entre eux par un tétracorde conjoint, de leurs vraies proportions musicales, et surtout de la formation et de la position des divers tétracordes, relativement aux différents modes. Burette a compté en montant les cordes du système, qui doivent l’être en descendant ; erreur répétée par l’abbé Barthélemy. Il ne distingue point les faux calculs d’Aristoxéne des justes proportions de Pythagore. Il n’a point vu que notre gamme, hors de laquelle nous ne savons pas apercevoir de musique, n’est elle-même qu’un composé des deux tétracordes semblables, ut si la sol fa mi ré ut, dans lesquels le demi-ton occupe la même place. Ce n’est que dans les écrits de l’abbé Roussier (voy. ce nom) que l’on peut prendre une connaissance exacte de la théorie musicale des Grecs : lui seul a su débrouiller ce que laissent d’obscur les écrits des auteurs anciens recueillis par Meibom. Après avoir passé