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France, et à qui il communiquait tous les actes importants de son administration. Ce fut à l’occasion d’une de ces luttes parlementaires qu’il prononça ces paroles souvent répétées depuis : « Je sais fort bien que le gouvernement représentatif n’a pas été inventé pour le repos des ministres. » Son élocution, généralement ampoulée et dogmatique, manquait de précision et de netteté. Les débats qui s’élevèrent au sujet de la loi électorale furent le prétexte ou l’occasion de sa disgrâce. À la suite d’un exposé de motifs assez embarrassé, Vaublanc présenta à la chambre des députés un projet qui établissait deux degrés d’élection : les colléges cantonaux, composés de fonctionnaires publics et des soixante plus imposés, nommaient des candidats, parmi lesquels choisissait définitivement le collége électoral du département, également formé des principaux fonctionnaires publics, des soixante-dix plus forts contribuables et d’un supplément d’électeurs désignés par les colléges de canton parmi les citoyens payant trois cents francs et plus de contributions directes. Ce projet divisait les députés en cinq séries déterminées par le sort, dont chacune cessait ses fonctions d’année en année. Malgré l’esprit monarchique qui respirait, pour ainsi dire, dans chacune de ses dispositions, la majorité de l’assemblée accorda peu de faveur à ce projet, que le rapporteur, de Villèle, battit en brèche sur tous les points : il y substitua le renouvellement quinquennal et intégral, et des colléges à deux degrés, avec des électeurs à vingt-cinq francs. Son plan, beaucoup moins convenable à l’administration, mais infiniment plus favorable à la grande propriété, obtint une assez forte majorité a la chambre élective. Mais la chambre des pairs vit dans l’œuvre du ministère une violation formelle des droits consacrés par la charte, et dans le système de la commission le dessein de constituer une sorte d’aristocratie au profit exclusif de la propriété, et repoussa l’une et l’autre proposition. Cependant, comme une loi d’élection était indispensable, de Villèle fut invité par le ministère à proposer un nouveau projet. Il se borna, dit-on, à demander que pour le prochain renouvellement quinquennal on lit usage des listes électorales qui avaient servi à la formation de la chambre actuelle, et Vaublanc fut chargé de présenter cette proposition ; mais le côté droit se plaignit vivement qu’aucune précaution n’y eût été spécifiée contre le renouvellement partiel de l’assemblée jusqu’à la prochaine session. De Villèle, rapporteur du nouveau projet, combla cette lacune, qui n’était pas sans importance dans l’état d’antagonisme où se trouvaient la chambre et le ministère. Il proposa par forme d’amendement de déclarer que les colléges électoraux ne pourraient être appelés à aucune autre élection qu’à celles qui seraient nécessitées par une dissolution de la chambre. Cet amendement, qui excluait le renouvellement partiel et quinquennal, fut repoussé par H. Decazes comme inconstitutionnel ; mais il fut, au grand étonnement de la chambre, appuyé par Vaublanc, et prévalut à une très-forte majorité. Cette défection éclatante aigrit encore les dissentiments qui existaient depuis longtemps entre Vaublanc et quelques-uns de ses collègues, et qui avaient fini par dégénérer en hostilités déclarées. Il quitta le ministère le 7 mai 1816, avec de Barbé-Marhois, et fut remplacé par Lainé. Il reçut le titre de ministre d’État et celui de membre du conseil privé. Vaublanc ne reparut plus qu’en 1820 à la chambre, où il fut envoyé par le collége départemental du Calvados, à la suite des modifications qu’avait subies la loi électorale. Il ne cessa de siéger à l’extrême droite, de défendre, par ses discours et ses votes, les principes monarchiques, et de combattre le côté gauche comme en état d’hostilité permanente contre la royauté. À la session de 1821, il vota pour les six douzièmes provisoires et repoussa vivement l’insinuation de Stanislas de Girardin tendant à faire considérer l’offre du château de Chambord au duc de Bordeaux, comme un témoignage officiel sollicité par les agents du gouvernement. A propos de la discussion de la loi sur les donataires, il insista pour que l’on songeât à indemniser les émigrés, et rappela la proposition formulée en 1814, à ce sujet, par le maréchal Macdonald. Il fit rejeter aussi une réduction de vingt mille francs demandée par la commission du budget sur les encouragements destinés aux lettres et aux arts. Le 29 juin 1821, il fit un rapport au nom d’une commission spéciale, sur la prorogation de la censure des journaux, qu’il combattit comme inconstitutionnelle et arbitraire, et conclut contre le projet, qui fut néanmoins adopté. À la session de 1822, il fut élu l’un des vice présidents de la chambre, et obtint le même honneur dans la plupart des sessions suivantes. Il fut encore nommé rapporteur du projet de loi sur la prorogation de la censure, mais ce projet fut retiré par le ministère Villèle, peu de jours après son installation. Lors de la discussion de la loi des douanes, qui eut lieu à la session suivante, Vaublanc prit la parole avec chaleur dans l’intérêt de la prospérité coloniale, vrai moyen, dit-il, d’avoir une marine bonne et imposante, et insista pour la diminution des droits imposés aux sucres des colonies. À l’exemple de quelques-uns de ses collègues, il combattit la proposition de traduire à la barre de la chambre le procureur général Mangin, pour ses accusations prétendues calomnieuses contre plusieurs députés du côté gauche. L’année d’après, à propos du budget des douanes, Vaublanc attaqua assez vivement le système d’administration agricole, commercial et industriel du ministère, et profita de cette occasion pour demander l’établissement d’un entrepôt dans les Antilles françaises. Le 14 mars 1823, il déposa une proposition tendant à faire