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Véranzio fut obligé d’accompagner Soliman Ier (voy. ce nom), qui faisait la guerre aux Persans, et pendant cinq ans il suivit son quartier général, ce qui lui fournit l’occasion de recueillir des notions intéressantes sur les Turcs, sur leur gouvernement et sur les contrées qu’il parcourut. Busbeck, qui était attaché à l’ambassade, allait et revenait du quartier général turc à Vienne, où Véranzio retourna (1558), après avoir conclu une trêve avec la Porte. En 1567, Maximilien II l’envoya de nouveau à Constantinople, et en peu de temps il réussit à conclure avec Sélim II une paix avantageuse pour la chrétienté. Pendant son séjour à la cour ottomane, ce savant rassembla des manuscrits précieux, dont il ne reste plus que la traduction des Annales turques, qu’il avait découvertes à Angora. Sa famille conserve le manuscrit de cette version avec ses autres papiers à Sébénico ; c’est de là que Leunclavius a tiré son Histoire, ses Annales et ses Pandectes sur l’histoire des Turcs, ouvrages que les savants désignent sous le nom de Codex Veranzianus. Véranzio, nommé archevêque de Gran ou de Strigonie, primat de Hongrie, vice-roi du royaume (1569), couronne l’archiduc Rodolphe roi de Hongrie. Le discours qu’il adressa au prince au nom des États fut imprimé à Venise. Il mourut le 15 juin 1573, peu de jours après avoir reçu une lettre du pape Grégoire XIII, qui lui annonçait qu’il venait de le nommer cardinal. Sa famille conserve de lui, en manuscrit, les ouvrages suivants : 1o Vita Petri Berislai (voy. plus haut) ; 2o Iter Buda Hadrianopolim ; 3o De aitu Moldavia : et Tramilvaniœ ; 4o De rebus gestis Johannia regis Hungariœ libri duo ; 5o De obita Johannis regis Hungaria, Epistolœ ad Johannem Statilium, episcopum Transilvanum, datæ dum idem Statilius in Gallia oratorem ageret, 1540 ; 6o Animadversiones in Pauli Jovi Historiam, ad marginem ipsius Jovi ; 7o De obsidione et interceptione Badœ, ad Petrum Petrovich ; 8o Vita F. Georgy. Utisseny (cardinal Martinusse) ; 9o Collectio antiquorum epigrammatum ; 10° Multa ad historias Hungaricam sui temporis ; 11° Otia, seu Carmina, avec des lettres de Paul Manuce et de Palearius ; une pièce en vers latins que Seccerwitz publiée à Vienne, sous le titre de Veranzius, pour célébrer sa seconde ambassade à Constantinople. En 1797, la Dalmatie étant menacée par les armées françaises, on fit transporter à Vienne les manuscrits de Véranzio, avec les archives de sa famille. Le savant Kovachich, chargé de mettre en ordre ces papiers précieux, en a publié le catalogue sous ce titre : Elenchus chronologicus actorum partim originalium authenticorum, partim autographorum, partim apographorum, ex archivo Verantiano Draganichimuo. Les pièces les plus importantes sont celles qui ont rapport à l’ambassade de Constantinople, en 1556 et 1557. On trouve dans les Otia ou Carmina de Véranzio quelques petites pièces qui font croire que, dans sa jeunesse, il n’a point veillé sur sa conduite avec toute la sévérité que commandait son état. Il possédait à un degré éminent le talent de la parole, et à une grande pénétration dans les affaires il joignait des avantages extérieurs qui ont puissamment contribué aux succès de ses missions diplomatiques.

Veranzio (Fauste), neveu du précédent, évêque in partibus de Canadium, tomba en disgrâce auprès de la cour de Hongrie, parce que, dans la collation des bénéfices ecclésiastiques,

il l’avait compromise avec celle de Rome. Il a publié : 1° un Dictionnaire en cinq langues, Venise, 1595 ; 2° Logica nova, suis instrumentis formata et recognita, Venise, 1616, in-4° ; 3° Machine nova, addita déclaration latina, italica, gallica, hispanica et germanica, Venise, in-fol. Les planches de ce dernier ouvrage sont en grand nombre : on n’y trouve pas seulement des machines, mais des ponts, des églises et d’autres constructions curieuses, qu’il avait eu occasion d’observer dans le cours de ses voyages. Afin de rendre plus utile ce traité pratique de mécanique, il explique chaque manière ou construction dans les cinq langues qu’il connaissait. Sa logique fut, dans le temps, vivement critiquée, et elle méritait de l’être. Il a laissé en manuscrit : Regulæ cancellarium regni Hungariæ. Il avait aussi écrit une histoire de la Dalmatie, laquelle, d’après une disposition assez singulière de son testament, fut mise avec lui dans son tombeau.


VÉRARD (Amours), le plus célèbre des libraires parisiens à la fin du 15e siècle. Ainsi que le fait très-bien observer l’oracle de la bibliographie contemporaine, le savant auteur du Manuel du libraire, on lui doit la publication de plus de deux cents éditions d’ouvrages français, parmi lesquels se trouve un bon nombre de ces chroniques, de ces mystères, de ces productions poétiques, de ces romans de chevalerie, objet aujourd’hui de l’ardente convoitise des bibliophiles, et dont le prix, augmentant sans cesse, arrive à des chiffres extraordinaires. On manque de détails exacts sur la biographie de ce laborieux éditeur, on ne sait pas même au juste à quelle époque il commença le cours de ses productions. Le plus ancien livre avec une date certaine qui se présente sous son nom, c’est le Décaméron de Boccace, traduit par Laurent du Premier Fait, et que la souscription signale comme achevé le 26 novembre 1185. La demeure de Vérard est indiquée comme étant sur le pont Notre-Dame, et cette indication persiste jusqu’à l’an 1499, époque où ce pont s’écroula. Échappé à cette catastrophe, le zélé libraire se transporta près le carrefour St-Séverin, mais il y séjourne peu de temps, car dès le mois de septembre 1500, ou le trouve domicilié rue St-Jacques, près le Petit-Pont. Trois ans plus tard (septembre 1503), il était logé devant la rue Neuve-Notre-Dame ; tous les livres qu’il publia depuis portent cette adresse, mais ils s’arrêtent