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ANN

lorsqu’il vit que tout tendait au rétablissement de l’ancienne constitution, il travailla de tous ses moyens au rappel de Charles II. Après la restauration, il fut élevé a la dignité de comte, et nommé garde du sceau privé en 1673. Son opposition au duc d’Yorck et quelques autres circonstances lui firent perdre sa place en 1682 ; mais il se conduisit avec tant d’adresse qu’il parvint à recouvrer toute la faveur de ce prince, élevé au trône sous le nom de Jacques II. Annesley mourut en 1680, âgé de 72 ans : c’était un homme très-éclairé et un bon écrivain. On a pu lui reprocher beaucoup de versatilité ; mais jamais il ne manqua de modération. Il s’opposa souvent aux mesures illégales de Cromwell, et comme il n’avait pris aucune part a la condamnation de Charles Ier, il ne craignit pas de se montrer parmi les juges des régicides. On a de lui des Mémoires entremêlés d’observations morales, politiques et historiques, Londres, in-8o, 1693 ; et quelques écrits de controverse politique et religieuse. Il avait composé une histoire des troubles d’Irlande, de 1641 à 1660 ; mais cet ouvrage est perdu. S-d.


ANNET (Pierre), maître d’école à Londres, publia, en 1762, un ouvrage intitulé : the Free Inquirer (le Libre Investigateur), qui contenait des propositions contraires à la doctrine chrétienne. Cet ouvrage, très-médiocre pour le fond et pour la forme, ne pouvait attirer l’attention publique que par la témérité des opinions ; il excita un scandale assez général pour engager le gouvernement à en poursuivre juridiquement l’auteur. Il fut cité devant la cour du banc du roi, et déclaré, par un jury, coupable d’impiété et de blasphème. En conséquence, la cour le condamna à être emprisonné deux mois à Newgate, à être, dans cet intervalle, exposé deux fois au pilori, et ensuite détenu, pendant une année, dans la maison de force appelée Bridewell. Le même public qui avait été scandalisé du livre trouva la punition trop sévère. Pierre Annet, étant au pilori, ne fut point maltraité par le peuple. Il y fut exposé un jour avec un homme convaincu de parjure. Le peuple jetant de la boue et des pierres à celui-ci, un des spectateurs dit : « Prenez garde de blesser cet honnête homme, qui n’est que blasphémateur. » Une femme du peuple, lisant sur son écriteau : blasphémateur, dit : « Pardi, voilà un grand crime ! ne blasphémons-nous pas tous les jours ? » Il paraît que le châtiment ignominieux qu’il venait de subir, loin de servir à le corriger de ses erreurs, ne fit que l’y confirmer, et augmenta même sa témérité. Après son élargissement, il alla se loger en face du palais de l’archevêque de Cantorbéry, et y établit une école publique, dans laquelle il inspirait a ses élèves peu de respect pour l’Ancien et le Nouveau Testament. Cette conduite eut le succès qu’elle méritait lorsqu’elle fut connue, on lui retira peu à peu ses pensionnaires, et il fut obligé d’abandonner son école. Il continua de professer assez hautement ses principes irréligieux dans un café qu’il fréquentait habituellement. On lui demanda un jour ce qu’il pensait de la vie à venir ; il répondit par cet apologue : « Un de mes amis, voyageant en Italie, entra dans une ville : il vit une auberge, et voulut savoir si c’était celle qu’on lui avait indiquée ; il demanda à un passant si ce n’était pas l’enseigne de l’Ange. — Ne voyez-vous pas, lui répondit le passant, que c’est un dragon, et non pas un ange ? — Mon ami, dit le voyageur, je n’ai jamais vu ni d’ange ni de dragon ; je ne sais pas si cela ressemble à l’un ou à l’autre. » S-d.


ANNIBAL, fils de Giscon, suffète et général carthaginois, désirant venger sa patrie et sa famille, en effaçant la honte et la défaite de son grand-père Amilcar devant Himère en Sicile, partit, l’an 409 avant J.-C., a la tête d’une armée forte de 100,000 hommes, selon Timée, et de 200,000, suivant Éphore. Débarqué à Lilybée, il prit Sélitonte et Himère d’assaut, et abandonna ces deux villes a la fureur du soldat. Il détruisit entièrement la dernière, 240 ans après sa fondation, et fit égorger 3,000 de ses habitants, dans l’endroit même où son aïeul avait été tué. Après cette campagne, l’une des plus heureuses que les Carthaginois aient faites en Sicile, Annibal laissa quelques troupes pour la sûreté de ses alliés, et retourna à Carthage, avec les dépouilles de Selinonte et d’Himère : tous ses concitoyens allèrent au-devant de lui, et le reçurent au milieu des cris de joie. Trois ans après, Annibal fut renvoyé en Sicile, pour conquérir cette île tout entière, avec une armée plus nombreuse encore que la précédente. On lui donna pour lieutenant, à cause de son grand âge, Imilcon, fils d’Hannon. Les deux généraux ouvrirent la campagne par le siégé d’Agrigente ; ils le poussaient avec vigueur, lorsque la peste se déclara dans leur camp, et fit périr Annibal, avec une grande partie de son armée, l’an 406 avant J.-C. (Voy. Himilcon. B-p.


ANNIBAL l’Ancien, amiral carthaginois, ravagea les côtes d’Italie pendant la première guerre punique, l’an 201 avant J.-C. ; mais, attaqué par le consul Duilius, et entièrement défait, il fut obligé d’abandonner la galère qu’il montait, et de se sauver dans une chaloupe. Le sénat de Carthage lui ôta le commandement des forces navales, si l’on en croit Orose et Zonare ; mais on doit plutôt s’en rapporter à Polybe, qui assure que cet amiral resta à son poste et que sa flotte fut renforcée par un grand nombre de galères, avec lesquelles il remit en mer, et gagna les côtes de la Sardaigne. Surpris par les Romains dans un des ports de cette île, il y perdit encore plusieurs vaisseaux, fut attaché a une croix, et lapidé par ses propres soldats, qui attribuaient leur défaite à sa témérité et à sa négligence. B-p.


ANNIBAL, fils d’Amilcar Barcas, né l’an 247 avant J.-C., n’avait que neuf ans lorsque, voyant son père offrir un sacrifice pour se rendre les dieux favorables dans la guerre qu’il allait porter en Espagne, il se jeta à son cou, et le conjura de le mener avec lui. Amilcar, vaincu par les caresses de son fils, le prit entre ses bras, lui accorda sa demande, et lui fit jurer au pied des autels qu’il se déclarerait l’implacable ennemi de Rome, dès qu’il serait en âge de porter les armes. Amilcar s’attacha depuis à lui inspirer la haine profonde que lui-même