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dant il revint à Leipsick pour s’y livrer à la pratique de cette science ; et quelques opuscules, publiés dans les années suivantes (Progr. de leg. in delicta circa arbores, ib., 1796, in-4o ; Dissertationes duo de causis matrimonii annulandi, ib., 1798-1799, in-4o), montrent qu’il continua de s’en occuper un peu, et donnent à penser qu’il visait a quelque fonction ; mais il était riche ; il aimait les beaux-arts, la musique, la poésie, la peinture ; il était passionné pour la scène ; il faisait des vers, des expériences de chimie, de physique, de mécanique : on juge bien que de tels goûts, dans un homme maître de ses loisirs, empiétèrent promptement sur des études qu’ils faisaient trouver arides et rebutantes, et finirent par régner sans partage. Bien que dominé par son penchant littéraire, Apel éprouve d’abord quelque confusion de donner tout entière à des futilités poétiques une vie que la volonté de son père avait destinée à des travaux plus graves ; mais la lecture des écrits philosophiques de M. Schelling, alors dans leur nouveauté, le guérit de ces derniers scrupules ; la philosophie et la poésie, souvent confondues dans les écrits du philosophe, se marièrent dans son esprit ; la première rendait a l’autre, en gravité, ce qu’elle en recevait d’agréments et d’attraits ; Apel se persuada que la fantaisie poétique était aussi un mode d’investigation de la vérité, et le panthéisme mystique de M. Schelling eut en lui un enthousiaste dont la ferveur ne s’est jamais démentie. Il débuta dans la littérature par des articles de critique et quelques essais d’esthétique insérés dans le Leipziger Literaturzeitung, dans le Musikalische Zeitung et dans le Deutsch. Merkur (1800-1802). Pendant les années suivantes, il continua d’insérer dans plusieurs journaux et recueils périodiques ses essais poétiques et philosophiques, et des morceaux de divers genres. On cite comme enrichis de ses productions l’Allg. Literzeit. d’Iéna, le Journ. fur deutsch. Frauen, rédigé par Rochlitz, et continué sous le titre de Selene, le recueil du pote Kind, intitulé Malven, d’autres encore (Aglaia ; Taschend. für Liebe mund Freundschaft, etc.). Il travaillait avec facilité, et il ne cessa de faire paraître chaque année des poésies lyriques, satiriques, élégiaques, sérieuses, badines, des légendes, des drames, des contes et des romans. La plupart de ces ouvrages trop nombreux eurent du succès lorsqu’ils parurent ; quelques-uns excitèrent des discussions par leur forme nouvelle ; aucun n’a joui d’une renommée durable, et la réputation de l’auteur, établie sur ces titres frivoles, sera sans doute éphémère comme eux. En 1804, il publia des ballades et des contes ; puis il mit successivement au jour des nouvelles, parmi lesquelles on distingue : les Portraits de famille (1805) ; le Jugement de Dieu ; les Pierres tombées de la lune ; le Coq dans un panier, etc. ; des légendes, St. Jean et son chat ; les Lamentations déplorables du père Anselme ; un joli conte, l’Enfant paisible ; un recueil de ballades et de légendes(1806). En 1807, il fit paraître un livre sur le beau et le romantique, dans lequel il prenait la défense des littératures classiques. Un poëme qu’on cite avec éloge, Inès et Pédro, et un recueil d’élégies, parurent la même année. En 1809, il publia, avec F. Laun, un volume intitulé le Livre des fantômes, dans lequel on remarquait surtout ses deux contes : le Franc-Archer et la Dame des morts ; le premier a fourni le sujet d’une pièce de théâtre à laquelle la musique de Weber a donné beaucoup de vogue. Il a été réimprimé à part, Leipsick, 1825, in-8o. Ce recueil eut du succès, et les auteurs en ont fait paraître six nouveaux volumes jusqu’en 1817. Parmi les productions qui suivirent, nous nous bornerons à citer : 1810, la Visite du fiancé, Clara Montgomery, nouvelles ; les Cigales, recueil de poésies en 4 vol., dans lequel il a reproduit la plupart de ses opuscules poétiques déjà cités ; le 3e et le 4e volume n’ont paru qu’en 1811 et 1812 ; 1811, le conte intitulé : Der Schatzgraber, qui passe pour son chef-d’œuvre en ce genre ; 1812, l’Anneau nuptial ; l’Amour magique, contes, etc. En 1814 il donna, avec Laun, le Livre des merveilles (Wunderbuch), la Demoiselle d’argent, et d’autres contes ; en 1810, à Berlin, Zeitlosen, contes et poèmes. Il convient de s’arrêter un peu plus sur les pièces de théâtre qu’Apel a fait paraître, mais dont aucune n’a subi l’épreuve de la représentation. Après avoir longtemps étudié l’art dramatique, il lui vint à l’esprit de reproduire, dans une série de compositions, les caractères distinctifs des époques principales de l’histoire de cet art, autant qu’on peut les saisir dans les grands écrivains dont chacun peut être considéré comme le représentant d’une de ces époques. Il résumait ainsi, dans un seul drame, tout ce qui distingue une période de l’art, ou la manière d’un maître ; et la série de ses pièces devait offrir une suite de tableaux de ces périodes, représentées avec une scrupuleuse fidélité dans tout ce qu’elles ont de plus sensible, la contexture, la poésie et même la forme métrique des ouvrages. D’après ce plan, il donna en 1805 son drame de Polyidoa comme copie de la manière d’Eschyle ; en 1806, parurent les Ètoliens comme représentation de l’âge d’Euripide, et Callirhoé représentant la transition de la forme ancienne à la forme moderne. Conrad de Kauffungen, mis au jour en 1809, résume en lui les qualités et les défauts de la tragédie shakespearienne. Apel avait préparé une pièce a la manière de Sophocle, intitulée Thémistocle ; un drame satirique, Hercule en Lydie, sur le modèle sans doute du Cyclope d’Euripide ; une tragédie de Faust et quelques autres essais destinés à compléter le cercle de ses imitations. Ces derniers ouvrages n’ont point vu le jour, et ceux qu’a publiés l’auteur paraissent n’avoir été reçus du public qu’avec indifférence. Cependant ces études ingénieuses donnèrent naissance au plus important de ses écrits. Contraint d’approfondir, puisqu’il voulait le calquer dans ses imitations, le mécanisme de la prosodie grecque, les premiers ouvrages de M. Godefroi Hermann sur ce sujet furent d’abord ses guides ; puis il imagina, sur la cadence ou la mesure dans la versification grecque et sur les points de liaison de la musique et de la poésie, d’après le système poétique