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Noire, malgré les deux derniers jours d’orages et de pluies. Là aussi, une partie de la voie avait été détruite, et des centaines d’ouvriers — commis sans emploi et gens de magasins — travaillaient à côté des terrassiers ordinaires et nous fûmes encore cahotés sur une voie provisoire, hâtivement établie.

Tout au long de la ligne, l’aspect de la contrée était désolé et bouleversé. Wimbledon avait particulièrement souffert ; Walton, grâce à ses bois de sapins qui n’avaient pas été incendiés, parut être la localité la moins endommagée. La Wandle, la Mole, tous les cours d’eau n’étaient que des masses enchevêtrées d’Herbe Rouge. Les forêts de pins du Surrey étaient des endroits trop secs pour que ces végétations les envahissent. Après la gare de Wimbledon, on voyait, des fenêtres du train, dans des pépinières, les masses de terre remuées par la chute du sixième cylindre. Un certain nombre de gens se promenaient là, et des troupes du génie travaillaient alentour. Un pavillon anglais flottait joyeusement à la brise du matin. Les pépinières étaient partout envahies par les végétations écarlates, une immense étendue aux teintes livides, coupées d’ombres pourpres et très pénibles à l’œil. Le regard, avec un infini soulagement, se portait des grès roussâtres et des rouges lugubres du premier plan, vers la douceur verte et bleue des collines de l’Est.

À Woking, la ligne était encore en réparation. Je dus descendre à Byfleet et prendre la route de Maybury, en passant par l’endroit où l’artilleur et moi avions causé aux hussards, et par la lande où un Marsien m’était apparu pendant l’orage. Là, poussé par la curiosité, je fis un détour pour chercher, dans un fouillis d’Herbe Rouge, le dogcart renversé