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rais pu en faire autant en une journée, mais j’avais en lui une foi suffisante pour l’aider, toute la matinée et assez tard dans l’après-midi, à creuser son passage souterrain. Nous avions une brouette et nous entassions la terre contre le fourneau de la cuisine. Nous réparâmes nos forces en absorbant le contenu d’une boîte de tête de veau à la tortue et une bouteille de vin. Après la démoralisante étrangeté des événements, j’éprouvais à travailler ainsi un grand soulagement. J’examinais son projet et bientôt des objections et des doutes m’assaillirent, mais je n’en continuais pas moins mon labeur, heureux d’avoir un but vers lequel exercer mon activité. Peu à peu, je commençai à spéculer sur la distance qui nous séparait encore de l’égout et sur les chances que nous avions de ne pas l’atteindre. Ma perplexité actuelle était de savoir pourquoi nous creusions ce long tunnel, alors qu’on pouvait s’introduire facilement dans les égouts par un regard quelconque, et de là, creuser une galerie pour revenir jusqu’à cette maison. Il me semblait aussi que cette retraite était assez mal choisie et qu’il faudrait, pour y revenir, une inutile longueur de tunnel. Au moment même où tout cela réapparaissait clairement, l’artilleur s’appuya sur sa bêche et me dit :

— Nous faisons là du bon ouvrage. Si nous nous reposions un moment ? D’ailleurs, je crois qu’il serait temps d’aller faire une reconnaissance sur le toit de la maison

J’étais d’avis de continuer notre travail et, après quelque hésitation, il reprit son outil. Alors, une idée soudaine me frappa. Je m’arrêtai, et il s’arrêta aussi immédiatement.

— Pourquoi vous promeniez-vous dans les com-