Page:Mercure de France - 1766-02.djvu/11

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Dont le triſte bonheur fut d’ouvrir des tombeaux,
Quel fut après ſa mort le terrible Alexandre ?
Quand chaque âge bénit les Princes de ton ſang,
Qui n’ont point, quoique Rois, méconnu la nature,
Alexandre n’eſt plus qu’un illuſtre brigand[1],
Et le nom de Néron, paſſe pour une injure.



VIII.

Le courage n’eſt point à livrer des combats,
Où l’orgueil eſt conduit par l’attrait de la gloire :
Cette yvreſſe à l’eſprit dérobe le trépas,
Qui s’éclipe à l’éclat dont brille la victoire.
Mais quand la mort cruelle, une faulx à la main,
Portant autour d’un lit ſon appareil funèbre,
On la voit, comme toi, d’un œil fixe & ſerein[2],
C’eſt-là de la valeur l’effort le plus célèbre.



IX.

Si des peuples jaloux, ou des Rois prévenus,
D’un règne floriſſant enviant l’harmonie,

  1. C’eſt le reproche que lui fit un pirate. Alexandre lui ayant demandé quel droit il croyoit avoir d’infeſter les mers, le même que toi, lui répondit-il avec, autant d’énergie que de liberté, d’infeſter l’univers : mais parce que je le fais avec un petit vaiſſeau on m’appelle brigand ; & parce que tu le fais avec une grande flotte, on te donne le nom de conquérant. Cicér.


    Un Ambaſſadeur des Scythes lui tint à peu prés le même langage ; Tu te vantes, lui dit-il, de venir pour exterminer les voleurs, mais toi même le plus grand voleur de la terre. Quint, Curt.

  2. Spiritu magno vidit ultima Ecc. 48.