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vieille expérience… Refaites donc votre plan, et n’oubliez pas surtout que sans rivalité d’amour, point de pièce. »

Un ami de M. S…, qui était présent et qui sortit en même temps que nous, dit à Élisa, chemin faisant :

« Vous ne me paraissez pas bien convaincue, mademoiselle, de la possibilité de faire une bonne tragédie avec la rivalité d’amour.

— Ce n’est pas la conviction qui me manque, monsieur, croyez-le bien, je ne manque que de goût pour l’imitation, voilà tout ; car vous sentez bien qu’il n’y a pas de moyen de conserver de doutes sur la possibilité de faire une bonne pièce avec la rivalité d’amour, puisque ce sentiment irrésistible, véritable vautour du cœur, est le pivot de tant de chefs-d’œuvre que les siècles ont consacrés, et dont les continuels succès donneraient un démenti formel aux plus incrédules… Mais, vous le savez, tous les écrivains ne réussissent pas également dans le même genre, chacun a le sien… Les uns traduisent, imitent… les autres créent… Moi, je me crois plus de dispositions pour créer que pour imiter ; et si ce n’était la crainte que M. S…, dont j’admire le beau talent dramatique, ne s’imaginât