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Sans ramasser un seul des débris de ton règne,
Des flatteurs d’autrefois sans un seul qui te plaigne ;
Versant d’indignes pleurs dans les lâches regrets,
Tu resteras chargé d’inutiles forfaits.
Alors, tu mendîras l’oubli pour ta mémoire,
Mais en vain ; des héros s’il conserve la gloire,
S’il redit leurs vertus, l’inflexible avenir
Garde aussi des tyrans l’odieux souvenir :
On ne t’oublîra pas !

BOABDIL, furieux.

                                        Silence à ton audace !
C’en est trop ! Si le ciel accomplit la menace,
Si du trône je dois être précipité,
Devant ce qu’il me reste encor d’autorité,
Obéis ! Son arrêt, juges !

IBHAHIM, quittant les juges qui ont opiné pendant le débat
d’Abenhamet et de Boabdil.

                                      Roi, son outrage
De leur crime n’est pas l’irrécusable gage ;
Nous n’avons pas de preuve.

BOABDIL, furieux.

                                                  Achevez ces débats !

IBRAHIM.

Nous ne pouvons absoudre, et ne condamnons pas.

BOABDIL.

Eh bien ! prononcez donc.

IBRAHIM.

                                                Roi, propice ou contraire,
Aux passions la loi doit rester étrangère ;
Le crime est tout pour elle ; et devant son forfait,
Comme l’accusateur, l’accusé disparaît.