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mois dans les tranchées et connu l’action sous sa forme la plus mâle n’auront plus le goût de s’attarder au mystère de « l’écriture artiste » ni de déchiffrer les « rébus » qui, sous prétexte d’originalité, leur étaient offerts. Ils demanderont le langage robuste et clair, alerte et plein.

Et la littérature sera différente, parce que les sentiments seront différents. Plus on a souffert pour quelqu’un, plus on l’aime. Il est certain que l’amour de la patrie va reprendre dans les âmes en temps de paix un empire qu’il avait perdu, qu’il n’avait peut-être jamais connu à ce degré, car aujourd’hui il est devenu conscient. La conscience, voilà le trait caractéristique de cette guerre. Ce ne sont plus seulement des soldats qui obéissent : « Ils savent pourquoi ils se battent et ils veulent se battre. » « Ça vaut tout de même la peine de se battre pour un beau pays comme celui-là, » disait un des mobilisés français en regardant le paysage de l’Île-de-France. Il y a dans ces mots plus que