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taires s’étaient un peu désintéressés de lui. Le matérialisme historique, dont il semblait avoir fait son credo définitif, le reléguait dans les préoccupations économiques et paraissait mettre une barrière entre lui et les choses hautes et grandes.

La guerre devait nous montrer notre erreur. Déjà, pendant la campagne de Lybie, les sentiments qu’exprimaient dans leurs lettres les soldats italiens m’avaient frappée. L’un d’eux, racontant une de ses factions dans le désert, par une claire nuit d’été, se servait d’images si belles pour décrire sa veillée d’armes qu’un grand poète ne les aurait pas désavouées. Et le père, un simple ouvrier gazier qui me lisait la lettre, en comprenait, on le sentait, toute la profondeur et toute la beauté. Cette lecture m’avait rendue rêveuse. Le peuple était-il dans l’aridité générale, le grand réservoir où l’humanité pouvait puiser des forces nouvelles ? Puis l’esprit faussé de ceux qui le dirigent venait réveiller nos préjugés contre lui.