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croyait en savoir davantage que le vieux serpent. On ne reconnaissait aucune supériorité, on se grisait de soi-même avec une facilité inouïe, et une certaine arrogance de ton était devenue habituelle chez la plupart.

En réalité, la pusillanimité régnait dans les âmes. On continuait à porter des coups au prochain — et avec combien d’animosité — seulement on cachait soigneusement la main qui portait le coup. Quant à l’indulgence témoignée parfois pour les erreurs du voisin, on se rendait compte qu’elle avait sa source dans la peur. Par crainte des vengeances et des délations l’on ne se permettait plus de réagir contre les abus, les injustices, les forfaitures de tout genre. Du reste, l’on ne s’indignait plus guère pour les questions d’ordre général ; on ne sentait que l’offense personnelle.

On a vu des gens refuser de s’émouvoir pour le martyre de la Belgique, des femmes qui pleuraient lorsque leurs enfants risquaient un rhume de cerveau ou qu’une égratignure avait rayé