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parle de cet état de demi-aisance où le développement intellectuel peut être complet sans que le luxe devienne jamais possible. La misère, si elle mérite le respect par les souffrances qu’elle représente, est une condition plus fâcheuse encore que la richesse au point de vue spirituel ; elle empêche, elle dégrade, elle enlève la possibilité de la joie. Or, justement, parmi les privilèges de la pauvreté, je plaçais en première ligne la joie de l’esprit dans la liberté qui est si difficile aux riches.

Ce que je pensais alors, je le pense aujourd’hui ; du reste, il y a deux mille ans qu’Horace l’a dit en deux mots répétés à satiété à travers les siècles. Mais l’aurea mediocritas du poète latin représente à l’imagination des vases de miel parfumé, des jardins pleins de roses, la paix des champs dans l’abondance, tandis que la médiocrité de notre époque signifie souvent un décor triste, d’âpres combats et des privations dissimulées qui font saigner le cœur et aigrissent le caractère.