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slave, en baltique et en germanique, et il y est remplacé par des périphrases et des qualificatifs :

v. sl. medvèdǐ, serbe mèdvjed, slov. médvẹd, r. medvếď, v. pol. miedz′wiedz′ (Los′, Složnyja slova, p. 117 ; pol. mod. niedz′wiedz′), v. tch. medvied (tch. mod. nedvěd ; v. Gebauer, Hist. mluv., I, p. 444) ; le mot signifie étymologiquement « mangeur de miel » et répond pour la forme à véd. madh(u)v-ád- ; il sert en slave à nommer l’ours mâle. C’est un des très rares composés qui soient vraiment slaves communs, et la composition n’y est plus qu’à peine sensible en slave ; on notera les formations altérées par étymologie populaire, r. dial. vedme′d′, pet. r. vedmíd′.

v. sl. mečĭka, bulg. méčka, s. mȅčka, r. méčka ce mot, étranger aux dialectes slaves occidentaux, désigne la femelle, qu’on nomme aussi medvědica sur tout le domaine slave : le serbe lui a donné un neutre mȅče « ourson » et le bulgare un masculin. Le lit. meszkà « ours (en général) » doit être un emprunt au russe, avec un léger changement de sens ; il est inutile de recourir, avec M. Brückner (Lituslav. stud., I, 108), à un polonais mieszek, qui serait plutôt un emprunt du polonais au lituanien. La dénomination sl. mečĭka est peut-être tirée du grognement de l’ours ; cf. lit. mekénti « bêler », s. méčati, méknuti « bêler » ?

lit. lokỹs (accus. lõkį ; fém. lókè), lette lācis. Il y faut sans doute voir le « lécheur », cf. lit. lakù « je lèche », comme le suggère M. Gauthiot ; le vocalisme long de la voyelle radicale est le même que celui de lit. żõdis