Il faut savoir si Dieu s’est proposé de fixer et d’ordonner
les événements, ou s’il n’a eu en vue qu’un but d’éthique et
un moyen de persuasion : Si in factis narrandis non aliud consilium fuit nisi ἐλεγκτικόν, aut ἠθικόν, eum ut minus veracem ob ordinum neglectum traducere nefas est. Dans les livres purement historiques, le Saint-Esprit a réglé l’ordre des temps, mais cela n’a pas eu lieu dans les Evangiles. Les écrivains sacrés y relataient les faits dans l’ordre où ils leur venaient à la mémoire. L’Esprit-Saint n’a point voulu corriger les interversions qu’offraient leurs souvenirs.
L’inspiration ne s’étend point, selon Patrizzi, aux mots, à leur arrangement, à la diction, au style, en somme au discours lui-même. Nobis enim pro certo est inspirationem ad verba, cæteraque illa non protendi.
« Les décrets des rois sont regardés comme leur parole, et cependant ils n’ont souvent dicté ni les mots, ni les phrases, ni même toutes les pensées ; ils se sont contentés de déterminer l’objet du décret : à plus forte raison le décret est-il une parole royale lorsque le monarque en a dicté les pensées. De même, pour que la Bible soit la parole de Dieu, il n’est pas nécessaire que les écrivains aient recueilli de l’Esprit-Saint lui-même les mots dont ils se sont servis. Si cela était nécessaire, les traductions de la Bible ne seraient point inspirées. » Ce n’est que dans de rares circonstances que Dieu a dicté lui-même les phrases et les mots : cela est arrivé pour Moïse au Sinaï, pour Jérémie, XXXVI, I, 2,17, 18, mais non pour les Apôtres. « Car, s’il en avait été ainsi, dit le P. Patrizzi, pourquoi ces derniers se fussent-ils servis d’interprètes prêtant pour ainsi dire leur style grec aux Apôtres, lesquels se contentaient de suggérer les pensées, ainsi que l’a dit saint Jérôme (Ad Hedib., ep. CXX ; al. cl, 9, 11), ainsi qu’il apparaît par leurs écrits, et ainsi qu’ils l’ont réellement fait ? Jérémie lui-même, à moins d’un secours tout particulier, dont l’Ecriture ne parle pas, a-t-il pu reproduire exactement les paroles de Dieu lorsqu’il ne les a écrites que vingt-deux ans après les avoir reçues ? » « Il ne faut point prendre à la lettre, dit le même Patrizzi,