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une bataille au désert


superstitieuse, mais parce que je savais qu’il fallait habituer ainsi les chevaux du désert à la voix de leur maître. Je dormis ensuite entre les pieds de l’animal, avec autant de confiance que l’enfant couché entre les pattes soyeuses d’un terre-neuve.

Au moment où le jour commençait à se lever dans le fond de l’horizon, la tente du cheikh s’ouvrit et je vis l’Anglais venir vers moi.

« Dormez-vous ? me demanda Lindsay.

— J’ai dormi.

— Moi non.

— Pourquoi donc ?

— Il y a trop de population dans cette tente.

— Les Arabes ?

— Non, les fleas, les lice, les gnat[1]. »

Ceux qui connaissent l’anglais savent ce que mon compagnon désignait ainsi. Je me mis à rire.

« N’êtes-vous pas encore habitué à ces misères, sir Lindsay ? demandai-je.

— Non, jamais ! D’ailleurs, je pensais à vous ; je voudrais savoir si vous seriez parti sans me parler.

— Certes, non ; je comptais bien prendre congé de vous tout à l’heure.

— Oui, mais nous n’aurions pas eu le temps de nous entendre ; j’ai beaucoup de choses à vous dire. »

Il tira son carnet de notes, quoiqu’on vît à peine clair, et continua gravement :

« Si je me fais conduire à la place de quelque ruine en votre absence, je serai obligé de parler à ces Arabes ; donnez-moi différents renseignements. D’abord, comment dit-on ami ?

— Ahbab.

— Ennemi ?

— Kiman.

— La monnaie, le dollar ?

— Riyal frank.

— Une bourse ?

— Sourra.

  1. Les puces, les poux, les moustiques.