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les pirates de la mer rouge

— Non seulement j’en ai entendu parler, mais je l’ai vu.

— Vu ! quand ?

— Il n’y a pas longtemps : c’était hier !

— Et où ?

— Là, où est son vaisseau. Je lui indiquai du doigt la direction présumée. Il mouille là-bas, dans un petit golfe dont les environs sont déserts.

— Ah ! il est là ?

— Non, il est allé à la Mecque porter un présent au grand chérif.

— Le grand chérif ne se trouve point à la Mecque, mais à Téif. Merci pour le renseignement, merci, seigneur. Suis-moi. »

Elle lança vivement sa bête vers la droite. Bientôt j’aperçus une grande ligne bleuâtre fermant l’horizon. En approchant, je reconnus d’arides rochers de granit, tels qu’il s’en trouve dans les environs de la Mecque ; comme je le constatai plus tard, cette pierre est d’un grain d’une admirable finesse.

Dans un creux de la vallée, quelques tentes étaient disposées de manière à former un camp. Notre guide, me les montrant du geste, dit simplement :

« C’est là qu’ils sont !…

— Qui ?

— Les Beni Kufr (les maudits) de la race des Ateïbeh.

— Je croyais que les Ateïbeh habitaient el Zallaleh, el Taleh ou l’ouad el Robeyat.

— C’est vrai ; mais viens, tu sauras tout. »

Devant les tentes étaient couchés une trentaine de chameaux et quelques chevaux. Des chiens du désert, le poil hérissé, l’œil fauve, gardaient le camp. Ils firent entendre des hurlements épouvantables à notre approche ; tous les habitants du camp sortirent de leurs tentes, les armes à la main ; leur aspect me sembla très belliqueux.

« Attends-moi, » me dit l’Arabe. Elle descendit de son chameau et alla vers les guerriers, avec lesquels nous la vîmes parlementer.

Albani, non plus que Halef, n’avaient point entendu notre conversation ; mon fidèle serviteur me demanda d’un air inquiet :

« Sidi, à quelle tribu appartiennent ces gens ?

— Ils sont de la race des Ateïbeh.

— Je les connais ; ce sont les hommes les plus braves du