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étage ou des croumiers, lesquels viennent eux-mêmes marchander tout haut pour amorcer les chalands.

La femme, jouant le rôle de veuve, pleure en disant qu’elle est obligée de se séparer du seul legs de son pauvre mari. Et alors, pendant qu’elle vante la sagesse, la douceur de l’animal, le soi-disant orphelin passe et repasse sous le ventre du cheval, auquel deux compères soulèvent les deux membres postérieurs à la fois avec affectation. Ce sont d’habitude les animaux les plus vicieux, et qui ont l’air le plus pacifique, et si vous vous laissez attendrir par les pleurs de la veuve, séduire par la tranquillité du sujet, quelques heures après vous ne pouvez plus jouir en sécurité de votre emplète. Car la vertu du soporifique (opium ou tabac infusé dans un verre d’alcool) s’est dissipée.

Ces gens-là savent bien qu’ils sont exposés à des dommages-intérêts et même à la prison ; mais que leur importe ? ils ont changé d’habit, donné un faux nom et une fausse adresse et par-dessus tout ils sont insolvables.

Il y aurait, ce nous semble, un moyen de ne pas rester sans recours contre ces gens-là, malgré que l’on soit certain de leur insolvabilité, ce serait de déposer l’assignation lancée contre eux, chez le maire ou au greffe du tribunal civil, pour être à même de continuer les poursuites quand le vendeur serait retrouvé. Et il est probable que si le vendeur a trompé l’acheteur sur ses nom, prénoms, domicile et que le vice ait été constaté par un expert dans le délai légal, l’acheteur pourra plus tard intenter l’action en possession de dommages-intérêts à la condition de prouver les manœuvres frauduleuses.

Mais si la méchanceté et la rétivité prennent rang dans la liste