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Geneviève regardait Lamartine dont le profil doux, calme, et grave se détachait sur la fenêtre claire. Grand et svelte, il avait, dès qu’il faisait un geste, l’air de s’élancer.

On apporta du thé et des gâteaux, à la mode anglaise : Mme de Girardin et Lamartine se rapprochèrent. Le poète lui-même servit Geneviève : elle parla timidement des Méditations et de Jocelyn.

— J’ai renoncé à faire des vers, dit-il ; tout homme qui en écrit à mon âge devrait être privé de ses droits politiques. On croit que j’ai passé trente ans de ma vie à aligner des rimes et à contempler les étoiles ; je n’y ai pas employé trente mois.

Geneviève regardait avec un plaisir infini ces traits fins et mobiles, ces yeux alternativement bleus et gris comme un ciel d’automne. C’était le temps où il s’efforçait de donner à ses visiteurs une impression de maîtrise de soi et de bon sens vigoureux. Sa nature ondoyante et diverse était fatiguée