Page:Maupassant - Mademoiselle Fifi, OC, Conard, 1909.djvu/211

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Elle se mit à rire, d’un rire tremblant.

« Eh bien, monsieur… allons chez vous. »

Et ils ne parlèrent plus. Elle frissonnait par instants, toute secouée des pieds à la tête, ayant des envies de fuir et des envies de rester, avec, tout au fond du cœur, une bien ferme volonté d’aller jusqu’au bout.

Dans l’escalier, elle se cramponnait à la rampe, tant son émotion devenait vive ; et il montait devant, essoufflé, une allumette-bougie à la main.

Dès qu’elle fut dans la chambre, elle se déshabilla bien vite et se glissa dans le lit sans prononcer une parole ; et elle attendit, blottie contre le mur.

Mais elle était simple comme peut l’être l’épouse légitime d’un notaire de province, et lui plus exigeant qu’un pacha à trois queues. Ils ne se comprirent pas, pas du tout.

Alors il s’endormit. La nuit s’écoula, troublée seulement par le tic tac de la pendule ; et elle, immobile, songeait aux nuits conjugales ; et sous les rayons jaunes d’une lanterne chinoise elle regardait, navrée, à son côté, ce petit homme sur le dos, tout rond, dont le ventre en boule soulevait le drap comme un ballon gonflé de gaz. Il ronflait avec un bruit