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manger beaucoup (ce qui est encore le plus grand bonheur). Un estomac malade pousse au scepticisme, à l’incrédulité, fait germer les songes noirs et les désirs de mort. Je l’ai remarqué fort souvent. Je ne me tuerais peut-être pas si j’avais bien digéré ce soir.

Quand je fus assis dans le fauteuil où je m’asseois tous les jours depuis trente ans, je jetai les yeux autour de moi, et je me sentis saisi par une détresse si horrible que je me crus près de devenir fou.

Je cherchai ce que je pourrais faire pour échapper à moi-même ? Toute occupation m’épouvanta comme plus odieuse encore que l’inaction. Alors, je songeai à mettre de l’ordre dans mes papiers.

Voici longtemps que je songeais à cette besogne d’épurer mes tiroirs ; car depuis trente ans, je jette pêle-mêle dans le même meuble mes lettres et mes factures, et le désordre de ce mélange m’a souvent causé bien des ennuis. Mais j’éprouve une telle fatigue morale et physique à la seule pensée de ranger quelque chose que je n’ai jamais eu le courage de me mettre à ce travail odieux.

Donc je m’assis devant mon secrétaire et je l’ouvris, voulant faire un choix dans mes papiers anciens pour en détruire une grande partie.