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C’est en juin qu’il faut suivre cette côte où poussent, libres, sauvages, par les étroits vallons, sur les pentes des collines, toutes les fleurs les plus belles. Et toujours on revoit des roses, des champs, des plaines, des haies, des bosquets de roses. Elles grimpent aux murs, s’ouvrent sur les toits, escaladent les arbres, éclatent dans les feuillages, blanches, rouges, jaunes, petites ou énormes, maigres avec une robe unie et simple, ou charnues, en lourde et brillante toilette.

Et leur souffle puissant, leur souffle continu épaissit l’air, le rend savoureux et alanguissant. Et la senteur plus pénétrante encore des orangers ouverts semble sucrer ce qu’on respire, en faire une friandise pour l’odorat.

La grande côte aux rochers bruns s’étend baignée par la Méditerranée immobile. Le pesant soleil d’été tombe en nappe de feu sur les montagnes, sur les longues berges de sable, sur la mer d’un bleu dur et figé. Le train va toujours, entre dans les tunnels pour traverser les caps, glisse sur les ondulations des collines, passe au-dessus de l’eau sur des corniches droites comme des murs ; et une douce, une vague odeur salée, une odeur d’algues qui sèchent se mêle parfois à la grande et troublante odeur des fleurs.