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le vagabond

une servante qui rentrait au village, portant aux mains deux seaux de lait, écartés d’elle par un cercle de barrique.

Il la guettait, penché, les yeux allumés comme ceux d’un chien qui voit une caille.

Elle le découvrit, leva la tête, se mit à rire et lui cria :

— C’est-il vous qui chantiez comme ça ?

Il ne répondit point et sauta dans le ravin, bien que le talus fût haut de six pieds au moins.

Elle dit, le voyant soudain debout devant elle : « Cristi, vous m’avez fait peur ! »

Mais il ne l’entendait pas, il était ivre, il était fou, soulevé par une autre rage plus dévorante que la faim, enfiévré par l’alcool, par l’irrésistible furie d’un homme qui manque de tout, depuis deux mois, et qui est gris, et qui est jeune, ardent, brûlé par tous les appétits que la nature a semés dans la chair vigoureuse des mâles.

La fille reculait devant lui, effrayée de son visage, de ses yeux, de sa bouche entr’ouverte, de ses mains tendues.

Il la saisit par les épaules, et, sans dire un mot, la culbuta sur le chemin.

Elle laissa tomber ses seaux qui roulèrent à grand bruit en répandant leur lait, puis elle cria, puis, comprenant que rien ne servirait d’appeler dans ce désert, et voyant bien à présent qu’il